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Municipales : le bio bilan de Michaël Latz à Correns

Par Frédérique Hermine, le 1 juillet 2020

Journaliste

Photo F. Hermine

Maire de Correns pendant quatre mandats, Michaël Latz a entraîné son village du Centre Var sur la voie du bio et du développement durable. Un programme réussi de transition écologique avant la vague verte des dernières élections et qui sera poursuivi par la nouvelle équipe.

 

Le beau bilan bio de Michaël LatzAlors que la vague verte submerge les mairies de France et de Navarre, un petit village provençal a élu dès le premier tour une équipe conduite par Nicole Rullan, défendant l’environnement, la transition écologique, l’économie de proximité et la démocratie participative.

Mais l’étiquette verte de la commune ne date pas d’hier. L’ancienne première adjointe de Michaël Latz poursuivra la politique du tout en bio de l’ancien maire qui voulait passer la main après 37 ans à la mairie dont 25 au poste de premier magistrat municipal. « Sous les vieux baobabs, les jeunes poussent ont du mal à éclore », ironise Michaël Latz les yeux malicieux derrière une barbe de patriarche, citant un proverbe africain de son cru qui fait le lien entre sa terre de naissance congolaise et ses racines provençales à Correns. « Je ne veux plus être le moteur des choses mais je répondrai toujours présent si la nouvelle équipe qui compte sept conseillers sur huit de mon ancienne liste a besoin d’un coup de main ».

 

Faire de l’écologie rentable

Dès son premier mandat en 1995, cet ingénieur agronome, ancien élève de René Dumont, également ingénieur agronome et candidat écologiste aux élections présidentielles de 1974, avait incité tous les agriculteurs et vignerons de la commune à passer bio, faisant de Correns, au cœur de la Provence verte, le premier village bio de France.

Municipales : le bio bilan de Michaël Latz à Correns 1Après avoir rallié la cinquantaine de vignerons de la coopérative, il avait alors poussé à l’installation d’une éleveuse de poulets, un chevrier, deux maraîchers, un apiculteur, un oleïculteur, une ferme de chevaux, un producteurs de plantes aromatiques… Un pari d’autant plus surprenant que le propriétaire du domaine viticole des Aspras, vigneron en bio depuis un quart de siècle, était un ancien patron d’entreprise de phytosanitaires.

« Bien sûr, j’avais une sensibilité écologiste puisque je suivais déjà de près ce que disait René Dumont. Mais j’ai longtemps pensé que seule la technique pouvait faire avancer l’agriculture. Les scandales des OGM et de la vache folle m’ont guéri de cette vision du monde. On ne prend pas assez en compte le fait que lorsque l’on soigne une plante, ce n’est seulement la plante dont il s’agit mais aussi de millions de gens. Il peut apparaître que les plantes et les hommes ont alors les mêmes intérêts mais seulement à court terme. On ne pense pas assez aux conséquences à long terme. L’agriculteur est souvent seul sur son domaine, formé et informé avec un seul discours phytosanitaire. Quand j’ai parlé de conversion en bio à Correns, on m’a d’abord accusé d’être rétrograde. Je me suis donc attelé à faire de l’écologie mais rentable pour en garantir la pérennité ». D’abord en développant les circuits courts, la majorité des produits corrensois étant vendus sur la région sauf le vin désormais expédié dans le monde entier.

 

Ne pas rester focalisé sur son nombril
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Michaël Latz et ses fils

Le travail effectué avec la coopérative des vignerons de Correns en est un bel exemple. En parallèle de la révolution du bio et de la qualité, elle a su opérer une véritable révolution marketing avec la modernisation des packagings, l’ouverture d’une boutique au grand fronton peint d’arlequins, immanquable au rond-point d’entrée du Val, l’animation des ventes avec dégustations… Une dizaine de vignerons sont même passés en biodynamie. « En bio, la vigne est plus équilibrée et participe à la biodiversité, estime Michaël Latz. Bien sûr, je ne peux pas dire que les vins bios sont meilleurs, hormis pour la santé, mais je suis convaincu que cela aide. Car le vigneron bio, plus qu’un autre, est obligé d’avoir le nez tout le temps sur ses vignes et qu’il doit aussi être plus vigilant en cave ».

Si le célèbre couple Brad-Angelina est venu s’installer à Correns en 2008, c’était aussi pour cette raison, le domaine ayant déjà été converti en bio du temps de l’ancien propriétaire Tom Bove. « Finalement peu de gens savent que Miraval est à Correns; ça n’a donc pas aidé à faire connaître davantage la commune », regrette l’ancien maire. « Mais ça n’a pas eu d’influence positive ou négative. Je me plais à dire qu’au vu de la notoriété mondiale du village bio de Correns, je suis ravi d’avoir participé à améliorer la leur ».

Plutôt que d’évoquer le couple star, le vigneron préfère d’ailleurs raconter les actions de solidarité menées par l’association ‘Les Maîtres Vignerons Bio de Correns’ qui organise des ventes aux enchères de vins pour financer au Congo des villages durables, en formant à l’agroécologie des enfants-soldats et des filles-mères. « Il est important de mettre l’accent sur le volet social et solidaire pour ne pas rester focalisé sur son nombril ».

 

Pratiquer la démocratie participative

Ici, le bio est donc devenu un véritable mode de vie. Les Corrensois ont même créé l’association de démocratie participative Correns 21 qui a permis de lancer des jardins partagés, d’installer un système d’économie d’électricité pour l’éclairage public, lancer une étude sur l’intérêt du bio dans la biodiversité locale, éditer un livre des recettes du village récoltées auprès des anciens, organiser conférences et séminaires sur la transition écologique… La commune entièrement labellisée bio s’est également engagée dans les énergies renouvelables et le développement durable : panneaux solaires, peintures aux colorants naturels à la mairie, chauffage des locaux municipaux en valorisant les déchets du bois, mais aussi pédagogie à la cantine pour expliquer tous les jours aux enfants ce qu’ils mangent et les inciter à peser leurs déchets dans l’objectif de réduire le gaspillage, à connaître leur environnement. L’école a d’ailleurs été labellisée « éco-école » par l’Éducation Nationale pour son programme pédagogique sur l’environnement.

Mais finalement, ce dont Michaël Latz est le plus fier au lendemain de la remise officielle de son mandat, c’est que le village de 900 habitants est l’un des taux de vote le plus bas du Var pour le Rassemblement National. Michaël Latz se fait un plaisir de le mettre au compte de l’investissement dans le développement durable et dans les actions sociales et solidaires de sa commune ♦

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