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Réparer la ville : des architectes relèvent le défi !

Par Nathania Cahen, le 14 mai 2021

Journaliste

Les anciennes Halles Slimani à Marseille @VJD

[bref] La plus grande agence éphémère d’architecture du monde se réunit ce week-end au cœur du Marseille écorché. À l’invitation de l’association Va jouer dehors ! et de son chef de file, l’architecte Matthieu Poitevin, plusieurs de ses pairs mais aussi des témoins bardés d’expertises diverses vont s’installer au chevet des villes. De la Ville, avec un grand V.

 

Le constat de départ est une ville vieillissante et des modèles éculés. Elle ne cesse de prétendre se réinventer mais ne fait que reproduire des schémas qui ne se heurtent pas au réel.

Le premier enseignement pour tous ceux que la ville concerne, soit 90% de l’humanité, c’est de constater que le cynisme érigé en règle ne passe plus. Le règne d’un BTP tout puissant est sur le déclin.

« Jusque-là le faire, c’était faire le plus. Maintenant le faire, c’est faire le mieux. Qu’on se le dise, la ville à venir sera plus belle ! », assure Matthieu Poitevin.

Une bonne nouvelle. Mais il faut aujourd’hui gérer l’héritage d’une politique qui a laissé des traces dans la ville. Il y a partout des cicatrices ou des blessures qui la ségréguent et l’abîment. « Il faut les traiter. Pour un temps, l’architecte doit avant tout se faire réparateur de ville. Pour que celle-ci redevienne le terreau fertile du bien commun des citadins. »

Ce rassemblement inédit entend donner l’exemple et produire des exemples. Proposer des solutions, des alternatives, des réparations, des cautérisations. Sur lesquelles Marcelle reviendra, promis.

Il se tient dans les anciennes Halles Slimani. Pourquoi là ? « C’est le lieu le plus impossible que j’ai trouvé, s’amuse Matthieu Poitevin. Plus sérieusement, dans ce quartier dont l’identité a été massacrée, c’est le seul vestige du passé. Le dernier pont entre deux époques. S’il était rasé, ne resterait qu’une ligne de démarcation ».

 

 

7 villes, 11 projets

Marseille ne peut que s’enrichir de la sensibilité et l’intelligence des villes ayant d’autres façons de penser, à commencer par celles qui sont sans doute les plus novatrices et exemplaires de la nécessité de se ressourcer. Athènes, Beyrouth, Strasbourg, Lille, Nantes, Saint-Etienne.

Pour Marseille, 5 tables rondes se pencheront sur le territoire qui s’étend depuis le quartier de Plombières jusqu’à la mer. « Un territoire parcouru de gigantesques cicatrices jamais refermées de l’urbanisme stupide de la voiture des années 70 ».

À la table Plombières, la réflexion portera par exemple sur la question : « Comment redonner du sens à un lieu jusqu’aujourd’hui dédié à l’infrastructure de la voiture ? ». Pour l’équipe Bougainville, ce sera « Comment désenclaver un quartier qui fait figure de porte d’entrée de la cité ? ». Avec une attention particulière portée aux bâtiments emblématiques ou représentatifs du patrimoine.

 

L’association Va jouer dehors !

Elle a été créée au lendemain de l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne à Marseille, en novembre 2018. Va jouer dehors ! a pour mission de partager les connaissances d’un territoire par les acteurs concernés. Architectes, urbanistes, élus, promoteurs, écrivains, cuisiniers, plasticiens, philosophes, journalistes ou simples citadins. Pour proposer des projets concrets et plausibles sur des problématiques ciblées, afin de permettre à la ville de se réparer et de se projeter dans un futur possible. Apaisé et plus doux peut-être…

VJD ambitionne de devenir «Figure libre », un rendez-vous annuel et pérenne à Marseille. ♦