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J’ai testé l’appli La Bourse aux Livres

Par Agathe Perrier, le 28 juin 2021

Journaliste

Pour vendre ses bouquins sur La Bourse aux Livres, il faut d'abord commencer par les scanner © Agathe Perrier

Vendre ses livres en ligne sans se préoccuper de rédiger les annonces, prendre les photos ou même fixer les prix, voilà ce que propose La Bourse aux Livres. Certains qualifient cette appli de « Vinted » du livre, en référence à celle – très connue – dédiée aux vêtements et accessoires d’occasion. Ses créateurs la présentent néanmoins comme plus facile et pratique. Je l’ai téléchargée pour me faire une idée.

 

L’occasion n’a jamais aussi bien marché. Et les livres ne font pas exception. Un marché qui séduit d’un point de vue économique – ils coûtent en moyenne 60% moins cher que leurs homologues neufs– et écologique. Différentes plateformes spécialement dédiées à la vente d’ouvrages d’occasion ont ainsi émergé ces dernières années. Parmi elles, La Bourse aux Livres, créée par trois étudiants lillois, dont un originaire d’Avignon (voir bonus). Si j’ai troqué le format papier contre une liseuse, il y a plusieurs années déjà, mes bouquins fétiches précieusement conservés m’ont permis de tester cette application lancée en janvier 2020. Et qui se veut, d’après Alexandre Taillandier, cofondateur et directeur général, « la plus simple d’utilisation possible pour lever toutes les contraintes du marché de l’occasion ». Vraiment ?

 

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La Bourse aux Livres se charge des annonces, des ventes et des envois des livres aux acheteurs © DR
Simplicité ++

Il est vrai que, si l’on veut vendre des affaires d’occasion sur les plateformes existantes, la patience est souvent le maître-mot. Entre les photos à prendre, l’annonce à rédiger, l’envoi du colis et l’éventuel SAV, le jeu n’en vaut pas forcément la chandelle pour seulement quelques euros sont à la clé.

La Bourse aux Livres simplifie grandement la démarche. Notamment en estimant elle-même la valeur des ouvrages. Il faut pour cela scanner leur code-barres (ou renseigner leur numéro IBAN) afin de connaître le prix maximal que l’on peut en tirer. Et c’est tout. La start-up se charge de l’annonce, de la vente et de l’envoi à l’acheteur. Il suffit de lui faire parvenir ses bouquins en les déposant dans un point relais ou dans un magasin Fnac. « L’ensemble des frais sont à notre charge », appuie en plus Alexandre Taillandier. Une fois la vente terminée, le portefeuille virtuel du vendeur est crédité.

 

 

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0,11 euros proposés pour la vente de mon exemplaire de L’oiseau de mauvais augure de Camilla Läckberg. Le livre se vend ensuite 4,28 euros sur la plateforme © DR
Un algorithme pour les estimations

Le prix de vente estimé après le scan est établi par un algorithme. Créé par La Bourse aux Livres, il pioche dans différentes sources de données. « Il faut savoir que le prix des produits d’occasion varie dans le temps, suivant l’offre et la demande. La difficulté supplémentaire pour nous est qu’entre le moment où le vendeur estime son livre et celui où il sera vendu, il se passe plusieurs jours voire semaines », reconnaît Alexandre Taillandier. La start-up ne peut donc garantir que le prix proposé lors du scan soit celui empoché. C’est pourquoi elle s’applique à ce que son algorithme soit le plus précis possible pour éviter les déceptions.

En parlant de prix de vente, j’ai d’ailleurs été déconcertée avec une proposition à 0,11 euro pour un livre format poche de Camilla Läckberg (photo ci-dessus). Difficile de croire qu’un tel montant puisse inciter à la vente. « Ce livre va être vendu aux alentours de 4 euros. La majorité de cette somme sert à couvrir les frais de port et les éventuelles commissions des plateformes de vente. C’est sûr qu’il ne reste parfois pas beaucoup pour le vendeur à la fin, mais c’est sa valeur à l’instant T »,expose le directeur général. Peut-être aura-t-il davantage de valeur quelques mois plus tard, comme le démontre l’exemple (rare) de la saga Arsène Lupin, dont les ventes ont explosé suite à la sortie de la série Lupin sur Netflix (bonus).

 

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Les livres collectés par La Bourse aux Livres se vendent généralement en deux mois © DR
Vendu en deux mois

Tous les ouvrages ne sont toutefois pas acceptés par La Bourse aux Livres. « Vous ne pouvez pas envoyer ce livre car sa valeur est trop faible ou nous en avons déjà trop en stock », me suis-je vue notifier en scannant mon exemplaire de La poursuite du bonheur de Douglas Kennedy. Là encore, cela dépend de l’offre et de la demande. L’équipe travaille en tout cas pour que ce message apparaisse le moins possible à l’avenir.

150 000 références différentes sont actuellement disponibles à l’achat. Sur la boutique en ligne de la start-up ainsi que sur d’autres plateformes, comme la Fnac. Les bouquins restent en vente pendant un an. 90% d’entre eux sont vendus avant la fin de ce délai, au bout de deux mois généralement. Pour ceux n’ayant pas trouvé preneur, deux choix se présentent au vendeur. « Soit il demande le retour de son livre, auquel cas il doit payer 4 euros de frais de port. Soit il accepte d’en faire don à une association. Si ces livres n’ont pas de valeur sur le marché français, ils peuvent servir à l’apprentissage de la langue dans des pays francophones en voie de développement », souligne Alexandre Taillandier. Les vendeurs malheureux cochent généralement cette case solidarité.

 

 

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Dorian Lovera, Alexandre Taillandier et Tom Castano, les trois fondateurs de La Bourse aux Livres © DR
Une nouvelle vie pour 350 000 livres

En 16 mois d’existence, La Bourse aux Livres a été téléchargée environ 205 000 fois. Près de 350 000 livres y ont été vendus. La plupart sont en très bon état, proches du neuf d’après Alexandre Taillandier. « On veut montrer qu’acheter des livres d’occasion est économique, bon pour l’environnement et avec un niveau de qualité égal à ce qu’on peut trouver en librairie », ambitionne le jeune entrepreneur.

Les trois fondateurs sont aujourd’hui entourés d’une équipe de neuf personnes. D’un chiffre d’affaires de 500 euros par mois au lancement de l’application en janvier 2020 – correspondant à une soixantaine d’ouvrages vendus – la start-up est passée à 350 000 euros en mai dernier (55 000 livres écoulés). Elle se finance d’ailleurs uniquement grâce à la vente des bouquins. Sur l’ensemble de l’année 2020, son chiffre d’affaires global a atteint le million d’euros. Son objectif est maintenant de développer des services et fonctionnalités pour rendre l’application plus simple et attirer de nouveaux utilisateurs. Sachant que le marché du livre d’occasion français est estimé à 850 millions d’euros, cela laisse présager d’un bel avenir. ♦

 

Bonus 
  • Une appli née d’un besoin – On doit La Bourse aux Livres à Alexandre Taillandier, Dorian Lovera et Tom Castano. Si les deux premiers sont originaires du Puy-de-Dôme et de la Drôme, le troisième est un provençal, natif d’Avignon. Ils se sont rencontrés lors de leurs études de commerce à Lille. L’idée de La Bourse aux Livres leur est venue en voyant les manuels scolaires s’accumuler sur leurs étagères. Sans alternative simple et fiable pour les vendre, ils décident de créer leur propre plateforme. Ils ont commencé par y vendre les bouquins scolaires de leurs camarades puis l’ont ouverte à tous types de livres.

 

  • Le second souffle de la saga littéraire Arsène Lupin grâce à Netflix – Le premier recueil comptant les aventures d’Arsène Lupin a été publié en 1905. Début 2021, le héros né sous la plume de Maurice Leblanc a refait parler de lui… grâce à la télévision. La série Netflix Lupin, avec Omar Sy en rôle principal et inspirée des romans, a été un vrai succès sur le petit écran avec 70 millions de spectateurs dans le monde au bout de 28 jours. Le public s’est alors intéressé de nouveau aux livres, entraînant des ruptures de stock. Un engouement qui avait néanmoins été anticipé puisqu’une réédition du roman Gentleman Cambrioleur a été lancée en même temps que la série et devrait prochainement atteindre les 100000 exemplaires écoulés.
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  • Besoin d’inspiration ? Ma sélection de livres – C’est évidemment subjectif mais voici le type de bouquins que j’apprécie particulièrement. Les polars qui tiennent en haleine avec une fin plausible (la saga Millénium de Stieg Larsson). Les histoires si bien écrites qu’on aimerait qu’elles soient vraies (La poursuite du bonheur de Douglas Kennedy). Des vraies dans une époque révolue (Les Hauts de Hurle-Vent d’Emily Brontë) ou pas forcément (L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux de Nicholas Evans). Et d’autres si atroces que l’on aurait préféré qu’elles soient fictives (L’empreinte d’Alexandria Marzano-Lesnevich). Ces cinq livres vous coûteront 22,74 euros sur La Bourse aux Livres, soit une économie de 29,59 euros.