Fermer

Sur les traces des baliseurs de randonnée

Par Agathe Perrier, le 22 juillet 2022

Journaliste

Alyne et Hélène, animatrices mais aussi baliseuses de randonnée © Agathe Perrier

[série bénévoles #3] Elles sont le fil d’Ariane des randonneurs : les marques de couleur. Mais qui les peint sur les rochers et les arbres le long des sentiers ? Des amoureux de la nature pour sûr. Des passionnés d’itinérance aussi, soucieux et conscients de la nécessité d’entretenir notre parc de randonnées. Et c’est bénévolement qu’ils prennent de leur temps pour aiguiller nos balades.

 

Il est 7 heures ce lundi de mi-juillet et le thermomètre affiche déjà 23 degrés. Alors que certains sont en vacances et d’autres prennent la route du travail, Hélène et Alyne, elles, se sont donné rendez-vous au Tholonet, non loin d’Aix-en-Provence « À la fraîche », plaisante la première. Objectif de la matinée : baliser une portion du sentier entre les Espinades et Roques-Hautes puis une autre, commune au GR2013. Toutes deux animatrices de randonnées diplômées, elles se sont mises à l’activité de balisage depuis respectivement deux ans et six mois. « Comment les gens se débrouilleraient sinon ? Beaucoup ne savent pas lire les cartes », fait remarquer Hélène.

On compte aujourd’hui 230 baliseurs dans le département des Bouches-du-Rhône. Âge moyen : 72 ans. « Tous aiment la rando et beaucoup ne peuvent plus pratiquer comme avant. Baliser est une manière de continuer », explique Alyne. Et sa co-marcheuse du jour de nuancer : « Pas seulement ! Je dirais plutôt que ce sont des randonneurs conscients du bien public et du fait qu’il faut entretenir notre parc de rando ».

 

 

trace-sentier-chemin-balisage
Baliser consiste à peindre le tracé d’une randonnée pour la première fois ou à rafraîchir les anciennes marques de peinture © AP

Des règles et du bon sens

Ancienne infirmière mordue de marche depuis ses 20 ans, Hélène est la responsable balisage du secteur Concors-Sainte-Victoire. Un rôle qui s’apparente davantage à celui de coordinatrice que de cheffe. « C’est moi qui reçois les commandes de balisage, m’occupe du matériel à prévoir, de la logistique. Mais sur le terrain, le balisage se fait de façon collégiale », souligne-t-elle.

Un balisage peut consister à marquer pour la première fois un chemin. Les baliseurs évaluent alors sur quels emplacements peindre et appliquent une première couche. Ils repasseront quelques semaines plus tard pour la seconde. Baliser signifie aussi rafraîchir les traces qui, au fil du temps, commencent à s’effacer. Les GR (pour sentiers de Grande Randonnée) doivent par contre obligatoirement l’être tous les deux ans. Une activité que se répartissent les baliseurs à leur guise puisqu’elle repose sur le bénévolat. Ils sont généralement moins nombreux l’été en raison des vacances et de la chaleur, mais des sorties sont organisées tout au long de l’année.

Il y a en tout cas des règles à respecter quand on balise, listées dans la Charte du balisage de la fédération française de la randonnée, acteur historique du balisage en France. Une marque doit par exemple être séparée de la suivante par trois minutes de marche. L’appréciation du baliseur entre tout de même en jeu. « Si la route est sinueuse, on peut en mettre un peu plus souvent, mais sans surcharger », indique Alyne. En cas de changement de direction, une trace doit être apposée avant la bifurcation et confirmée rapidement sur le nouvel axe. Les marques doivent aussi être perpendiculaires au sentier, et non parallèles. Des principes qui relèvent finalement du bon sens : le baliseur doit en fait se mettre dans la peau du promeneur.

marque-sentier-chemin-randonnee
Les marques doivent aussi être perpendiculaires au sentier et se voir dans un sens comme dans l’autre lorsque l’itinéraire est à double sens © AP

 

Dans la mallette du baliseur

Tout bon baliseur est armé de son « camion ». Un terme emprunté au jargon des peintres et qui désigne le bac dans lequel se trouvent les outils indispensables au balisage : plane (couteau à deux manches pour tailler l’écorce des arbres), gouge, scie, lime, brosse… Rien que du manuel, pas de mécanique, pour des raisons de sécurité mais également d’assurance. Sans oublier, les pinceaux, pochoirs, gants et bien sûr, les pots de peinture.

À ce propos, les couleurs ne sont pas choisies par les baliseurs eux-mêmes mais par la FFRandonnée ou les collectivités locales. Il est convenu que les GR sont toujours représentés par un trait blanc au-dessus d’un rouge. Pour les GR de Pays, c’est un jaune sur un rouge et pour les PR (itinéraires de promenades et randonnées) une unique bande jaune. Quant aux teintes, elles sont normalisées de sorte à retrouver exactement les mêmes partout en France. Elles sont choisies selon le « RAL », le système de correspondance de couleurs européen. Le rouge est ainsi un RAL 3020, le jaune un RAL 1023 et le blanc un RAL 9016. Pour les tracés d’autres couleurs, il s’agit de parcours ne dépendant pas de la FFRandonnée et le choix revient alors aux collectivités qui les ont imaginés.

 

 

balisage-randonnee-benevolat-benevole
Parmi les outils du baliseur : la boucharde pour supprimer les anciennes traces de peinture © AP

Nature et partage

Aux petits outils essentiels au balisage s’ajoutent de plus imposants. Notamment une boucharde, un marteau à deux têtes en « pointe-de-diamant » pour supprimer les anciennes traces de peinture. Mais aussi un taille-haie et un sécateur à long manche. Car les bénévoles doivent s’assurer que les marques soient toujours visibles. Si tel n’est pas le cas, ils peuvent tailler quelques branches, dans le respect absolu de la biodiversité évidemment. Une nature qu’ils aiment et dont ils prennent soin. « On profite des balisages pour ramasser tous les petits déchets que l’on trouve », glisse Hélène.

Malgré les kilomètres avalés chaque mois, impossible pour nos deux passionnées de marche de placer un itinéraire de randonnée au-dessus des autres. « Ça dépend pour ma part des saisons. Il y a certains chemins que je préfère en automne ou en été en fonction de ce que l’on y voit », sourit Alyne. Chacun est en tout cas invité à les rejoindre pour baliser. Si une formation existe, elle n’est pas obligatoire. Et les baliseurs aguerris se font un plaisir à transmettre les bases aux novices. Baliser est aussi, et presque avant tout, une question de partage et de convivialité. ♦

 

En raison des conditions météo (fortes chaleurs et vent) qui accentuent la sécheresse, tous les massifs forestiers du département 13 sont fermés jusqu’au 25 juillet inclus.
Retrouvez la carte d’accès aux massifs, mise à jour quotidiennement, en cliquant ici.

 

Bonus

  • Des sentiers balisés et normalisés – Chaque comité départemental de la FFRandonnée balise les sentiers en suivant le Plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée (PDIPR). Ils agissent sur commande des départements, qui financent les opérations. Le PDIR des Bouches-du-Rhône compte 2 700 kilomètres de parcours balisés et entretenus. Les baliseurs de la fédération française de la randonnée entretiennent leurs propres GR et GRP.
  • Envie de balade ? La recommandation d’Hélène et Alyne pour une balade facile : se rendre au barrage du Bimont. Garez-vous au cimetière du Tholonet et empruntez le sentier jaune. Arrivé à l’aqueduc de Doudon, prenez le sentier rouge jusqu’au barrage du Bimont. Pour le retour, suivez le sentier vert en pointillés jusqu’à Doudon puis reprenez le jaune. Comptez 3 heures pour cette boucle des plus agréables. Et pour encore plus de balades, la FFRandonnée des topoguides à retrouver ici.
  • Un GR en préparation dans le pays d’Aix – Le « sentier de l’eau » sillonnera environ 400 kilomètres sous forme de 3 pétales. Le but ? Permettre la découverte du patrimoine qui a trait à l’eau dont Aix-en-Provence sera le centre. Les études sont en cours pour ce projet porté par les offices de tourisme d’une quarantaine de communes et qui devrait se concrétiser en 2024.