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Bio : la filière appelle à l’aide

Par Maëva Danton, le 10 avril 2023

Journaliste

Magasins bio, grossistes, logisticiens, transformateurs ... Nombreux sont les acteurs de la filière bio à avoir relayé la pétition. Ici Jean-Christophe Bernard, co-initiateur de la pétition, aux côtés de Roustom, gérant de Biocoop Grand littoral à Marseille @DR

[bref] « Un plan de soutien et pas des clopinettes », voilà ce que réclame pour l’agriculture bio la pétition Stop Mépris Bio lancée par des entrepreneurs de la filière. Vital, alors que celle-ci connaît une crise sans précédent.

La filière bio est en crise. Selon la Fédération nationale de l’agriculture biologique (Fnab), l’achat de produits bio a chuté de 6,3% en France entre janvier et septembre 2022. Une tendance à la baisse visible depuis 2021 déjà. Résultat de l’inflation et de la crise de la consommation alimentaire qui en découle. S’y ajoute la concurrence de labels beaucoup moins exigeants, mais perçus par beaucoup de consommateurs comme équivalents, à l’image du label HVE (haute valeur environnementale).

 

Bio : la filière appelle à l’aide
A droite, Philippe Delran, co-initiateur de la pétition et cofondateur du site Biolinéaires. Dans un magasin Biomonde du côté d’Arcachon @DR

Plan de soutien de 10 millions d’euros : « cela fait 160 euros par ferme »

Pour aider la filière bio à faire face à cette situation, le gouvernement a annoncé début mars un plan de soutien à l’agriculture bio. Plan à hauteur de 10 millions d’euros. Mais qu’est-ce que cela représente ? Pas grand-chose assure Jean-Christophe Bernard, cofondateur de l’entreprise marseillaise Morice qui fabrique des desserts végétaux. « Dix millions, cela fait 160 euros par ferme. Le gouvernement n’est plus intéressé par le bio et se cache derrière l’idée que le bio c’est cher ».

Et de comparer aux 2,37 milliards d’euros accordés à l’agriculture conventionnelle. « Sachant que le bio pèse 15% de l’agriculture française, nous devrions avoir au moins 150 millions d’euros ». Sans compter que l’agriculture bio génère moins de coûts pour la collectivité : moins de pollution de l’eau dont le traitement coûte très cher, moins de problèmes de santé pour les agriculteurs et les consommateurs… Avec en outre une vertu : celle de créer davantage d’emplois que l’agriculture conventionnelle. En effet, à taille équivalente, l’Agence bio estime qu’une ferme bio emploie en moyenne 30% de main-d’œuvre en plus qu’une ferme conventionnelle.

 

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Simon Le Fur, co-initiateur de la pétition et fondateur du grossiste Aventure Bio, colle des tracs sur les palettes qu’il livre à ses clients. @DR

Un message aussi porté par la Cour des comptes

Pour se faire entendre, avec deux autres acteurs de la filière bio (Simon Le Fur et Philippe Delran), Jean-Christophe Bernard lance une pétition intitulée « Stop Mépris bio ». Le mot d’ordre : « Nous demandons un juste plan de soutien et pas des clopinettes ! Non à la mort programmée de la filière par manque de soutien ». Y sont énumérées, en comparaison des 10 millions potentiellement promis par le gouvernement, les diverses aides à destination de l’agriculture conventionnelle. Parmi lesquelles le soutien aux betteraviers à qui a été accordée une prolongation de l’usage de néonicotinoïdes.

Relayée par des acteurs de toute la filière (magasins, grossistes, logisticiens, industriels …), la pétition enregistre pour l’heure plus de 53 000 signatures. Soit un peu plus de la moitié de l’objectif de 100 000 soutiens. Ce qui doit permettre d’interpeller le gouvernement tout en sensibilisant les consommateurs sur l’intérêt de soutenir ce label.

Un intérêt confirmé en juin 2022 par la Cour de comptes qui expliquait alors que le développement de l’agriculture bio est « le meilleur moyen de réussir la transition agro-environnementale et d’entraîner les exploitations agricoles dites conventionnelles vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement ». La Cour pointait dans le même temps le manque de soutien public à la filière. Notamment le non-respect de la loi Egalim qui fixe à 20% la part de produits bio dans les cantines. Un objectif loin d’être respecté puisque dans la pratique, cette part avoisine plutôt les 7%. La marge de manœuvre est donc encore immense. ♦

 

  • Pour signer la pétition et pour en savoir plus, rendez-vous sur le site stop-mepris.bio.