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Des biscuits à partir de pains invendus

Par Agathe Perrier, le 15 décembre 2021

Journaliste

Une biscuiterie antigaspi va voir le jour à Marseille. Y seront confectionnés notamment des biscuits, sucrés et salés, avec de la farine issue de pain non consommé. Un projet porté par l’association Pain et Partage pour à la fois lutter contre le gaspillage et favoriser l’insertion professionnelle.

 

Déjà presque 25 ans que les boulangeries solidaires Pain et Partage se sont fait un nom à Marseille en fabriquant du pain bio et local. Un produit d’alimentation dont raffolent les Français (bonus) mais qu’ils gaspillent aussi beaucoup. 10% des pains produits en boulangeries seraient ainsi invendus et la majorité d’entre eux (60%) détruits, d’après une étude de l’Ademe de 2016. Soit tout de même 150 000 tonnes annuelles. C’est pourquoi l’association marseillaise mûrit depuis quelques années l’idée de récupérer les pains non consommés pour les transformer en biscuits.

 

 

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Diverses recettes sucrées ou salées ont déjà été validées : sablés, cookies, pâte à pizza, financiers, fonds de tarte… © Fondation de France

Recettes testées et approuvées

La biscuiterie antigaspi devrait prendre place dans un local de 16 m² dans le laboratoire actuel de Pain et Partage, situé dans le 15e arrondissement de Marseille. « Notre objectif est de collecter le pain auprès de structures qui ont des volumes conséquents », explique Benjamin Borel, cofondateur et cogérant de Bou’Sol, le réseau des boulangeries solidaires auquel appartient l’association. « Il sera séché et broyé pour obtenir une farine de pain. Cette dernière sera incorporée dans des biscuits ou cakes en remplacement de tout ou partie de la farine habituelle ».

Diverses recettes sucrées ou salées ont déjà été validées : sablés, cookies, pâte à pizza, financiers, fonds de tarte… Qu’il a fallu tester au préalable car le changement de type de farine nécessite des adaptations. C’est Éric, l’un des salariés en insertion de l’association, qui a pris les rênes de l’expérimentation. « Il a fait des essais en remplaçant 50%, 75% et 100% de la farine traditionnelle par celle de pain. Puis on les a dégustés en jugeant l’aspect visuel, le goût et le dimension friable du produit fini », confie Benjamin Borel. Côté goût justement, la farine de pain ne dénature pas celui que l’on attend en dévorant un cookie, par exemple. Elle lui ajoute par contre une note torréfiée, du fait du séchage, et un peu plus de craquant. Ajoutez à cela la satisfaction d’avoir évité de jeter une matière première finalement bien utile.

 

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La biscuiterie embauchera dans un premier temps quatre personnes en insertion © Fondation de France

4 emplois à la clé

Qui dit nouvelle activité, dit nouvelles embauches pour Pain et Partage. Quatre dans un premier temps estime Benjamin Borel. Des emplois comme toujours en insertion. Les boulangeries solidaires, en effet, emploient uniquement des personnes éloignées du monde du travail pour les aider à rebondir. Ils sont une trentaine actuellement et une soixantaine formés chaque année aux métiers de la boulangerie ou de la logistique.

L’équipe ne s’est fixé aucun objectif de production pour le moment. Elle compte d’abord se concentrer sur deux à trois recettes à base de farine de pain avant d’en lancer d’autres. Notamment des biscuits sucrés et salés qui auront la forme de la Bonne Mère, clin d’œil direct à Marseille. Ces produits seront vendus auprès de ses clients habituels – cantines scolaires, d’entreprises, de centres médico-sociaux ou structures caritatives. « L’enjeu est aussi de trouver de nouvelles sources de distribution. On pense aux marchés où l’on est déjà présents et pourquoi pas vendre dans de grandes enseignes », glisse Benjamin Borel. Avant cela, reste encore à définir les sources d’approvisionnement pour faire tourner la biscuiterie.

 

 

Objectif début 2022

Environ 50 000 euros sont nécessaires pour lancer la petite fabrique. Un budget financé par les fonds propres de Pain et Partage et diverses aides, comme le plan national France Relance. La Fondation de France a également ouvert une cagnotte en ligne (bonus). Près de 9 000 euros ont déjà été collectés, sur un objectif de 20 000 euros. Une somme nécessaire pour aménager le local et acheter du matériel (broyeur, tour pâtissier réfrigéré, laminoir, etc). La confection des premiers biscuits est attendue pour le premier trimestre 2022. ♦

 

Bonus

  • Participer à la cagnotte de la Fondation de France en cliquant ici.
  • La biscuiterie, première étape d’un projet plus ambitieux – L’association Pain et Partage travaille en effet depuis un an et demi sur un projet baptisé Pastis (pour pôle alimentaire solidaire territorial et d’innovation sociétale). Ce dernier a pour but de faire émerger un tiers-lieu nourricier rassemblant des initiatives des habitants et acteurs du territoire en faveur de la transition alimentaire. La biscuiterie est l’un de ses axes.
  • Des initiatives antigaspi un peu partout en France – Certaines consistent aussi à recycler le pain invendu en biscuits : Sookies au Mans (notre reportage ici) ou In Extremis du côté de Nancy. Même les animaux de compagnie ont droit aux leurs avec Scrap Gourmet, une entreprise située à Auch (Occitanie). Quand, en Île-de-France et Rhône-Alpes, Cocomiette fabrique des bières bio artisanales à partir des restes de pain.
  • Les Français et leur amour pour le pain –Quelques chiffres d’une étude réalisée en 2021 par Qualiquanti pour la fédération des entreprises de boulangerie. 87% des Français interrogés déclarent avoir toujours du pain chez eux et 48% reconnaissent qu’ils ne pourraient pas s’en passer. Leur consommation de pain est néanmoins légèrement en baisse : 105 grammes en moyenne contre 114 grammes en 2015. La baguette tradition est la favorite pour 41% des répondants, suivie par la baguette classique et le pain aux céréales. La boulangerie indépendante reste le lieu d’achat n°1 du pain malgré un léger recul (-6 points par rapport à 2015), suivi des grandes et moyennes surfaces (45%) et des réseaux de boulangeries (25%).

Le pain peut être bio, local et solidaire !