Fermer

Comment BelleBouffe nous incite à reprendre le pouvoir sur notre alimentation

Par Philippe Lesaffre, le 15 juin 2022

Journaliste

Diminuer un peu sa consommation de viande permet de s'offrir les bons produits du maraîcher ©Unsplash

Comment accéder à une alimentation plus saine et durable ? Dans la région lyonnaise, l’association BelleBouffe fait la promotion d’une cuisine plus végétale, moins axée sur la viande et les produits laitiers, dont la production est responsable d’une part importante des gaz à effet de serre dans le monde.

 

Comme le rappelle l’Ademe (agence de la transition écologique), l’alimentation représente un quart de notre bilan carbone. Et, dans notre assiette, ce qui a le plus d’impact sur la planète, c’est la viande. En cause : le méthane émis par les animaux d’élevage notamment les ruminants, les engrais, ainsi que le transport car, souvent, l’aliment que nous nous apprêtons à manger a parcouru des milliers de kilomètres avant de se retrouver sur notre table.

Dans le détail, la société Greenly (qui propose aux TPE de réaliser leur bilan carbone) indique sur son site que, « si la viande constitue seulement 8% du poids de notre panier, elle représente un tiers du bilan carbone total de ce même panier ».

D’où l’idée de valoriser une cuisine plus végétale, afin de réduire son impact, et ainsi d’oublier, au moins un peu, la consommation de viande et de produits laitiers. Voilà la mission que s’est fixée, à la fin du mois de mai, l’association écologique Anciela*. Elle a lancé, il y a quelques jours, « un mois de défis » visant à promouvoir la cuisine à base de légumineuses et de légumes. Et ce, à travers des ateliers et des événements organisés et animés par des structures locales, avec qui Anciela échange régulièrement.

 

« On insiste sur l’aspect plaisir, pas l’absence de viande »

Comment BelleBouffe nous incite à reprendre le pouvoir sur notre alimentation 1
Les recettes végétales peuvent largement être perçues comme « gourmandes » et donc, appétissantes ©BelleBouffe

Parmi elles, l’association BelleBouffe, qui cherche à démontrer, depuis son lancement en 2019, que des recettes végétales peuvent largement être perçues comme « gourmandes » et donc, agréables. Le 16 juin, par exemple, elle organise à Lyon son dernier « jeudi de l’alimentation » de la saison. Il s’agit d’un atelier de cuisine partagé, mensuel et à thème. Après une soirée consacrée à des recettes autour de la fleur en mai, BelleBouffe a invité à la mi-juin les participant.e.s à déguster des plats provenant de l’océan indien.

« En général, on insiste sur l’aspect plaisir et gourmandise, pas sur l’absence de viande, indique, à Marcelle, Alice Meyer, salariée et chargée d’animation au sein de l’association. Après un repas qu’on organise, la grande majorité des personnes ne regrettent pas qu’il n’y en ait pas eu, d’ailleurs. Cela ne se remarque pas… » Et de poursuivre : « On essaye de proposer différentes approches innovantes et inclusives dans le but de concevoir ou tendre vers un système alimentaire plus durable, plus sain, et, toujours, de qualité », précise-t-elle.

 

♦ Lire aussi : Un enfant qui plante un légume va aimer le manger

 

« Déjouer le marketing alimentaire »

Différentes approches, c’est-à-dire ? Alice parle d’actions régulières d’ « éducation populaire », comme elle dit, pour aider les citoyens à « reprendre le pouvoir sur leur alimentation ». BelleBouffe, lors d’ateliers ou de soirées, s’adresse à des publics différents, des jeunes et des moins jeunes, des étudiants, ou pas, avec qui l’association tente en particulier de « déjouer le marketing alimentaire ». La mission : comprendre d’où viennent les produits que l’on ingurgite, mettre en avant les outils numériques dont on peut disposer. Notamment la base de données collaborative Open Food Facts, pour mieux cerner ce que l’on achète et consomme, grâce au nutriscore et à l’écoscore. Analyser, par ailleurs, les impacts de nos habitudes sur notre santé est un défi qu’entend relever la structure lyonnaise.

Le tout, dans le but de parvenir, dit-elle, à ce que chacun et chacun « parvienne à réaliser son assiette idéale », à trouver des solutions, et même des idées de recettes. « Souvent, précise Alice, je propose aux personnes dans nos ateliers de me dire ce qu’elles aimeraient consommer dans l’idéal. En outre, je leur demande ce qu’elles changeraient dans leurs quartiers au niveau des commerces de bouche si elles avaient à disposition une baguette magique. »

 

« Accès à une alimentation plus saine et durable »

Comment BelleBouffe nous incite à reprendre le pouvoir sur notre alimentation 2
BelleBouffe veut aider les citoyens à « reprendre le pouvoir sur leur alimentation » ©Unsplash

Selon elle, il y a des lacunes à combler, il faut sensibiliser, ne jamais cesser d’apporter de l’information. Et batailler contre certains clichés qui, hélas, ne fanent pas. « Le bio, ce n’est pas pour moi », « le bio, c’est trop cher », les préjugés sont nombreux. « Mais si on diminue un peu sa consommation de viande, les bons produits du maraîcher deviennent accessibles. Tout le monde doit pouvoir avoir accès à une alimentation plus durable. »

Pour y parvenir, BelleBouffe tente de « connecter les habitants avec des acteurs des territoires ». En invitant en particulier à ses événements ceux qui vont au chevet des personnes en situation de précarité. Par exemple, l’association VRAC, en faveur de la distribution d’un chèque alimentaire pour les personnes dans le besoin et proposant des paniers de produits agricoles à prix solidaire grâce à des groupements d’achats sur le territoire.

De son côté, l’association du Rhône organise aussi un repas de Noël (événement annulé pendant la pandémie) à destination des personnes en situation d’exclusion. Et ce, grâce à des produits invendus, comme pour rappeler qu’un tiers des aliments, produits dans le monde, se retrouvent à la poubelle, chaque année.

 

♦ Lire aussi : La solution VRAC pour sortir les quartiers de la malbouffe

 

Plus de marchés de producteurs

On dit souvent que les Français ont perdu tout contact avec ses paysans. D’autant qu’il n’y a pas forcément de marchés de producteurs partout… « L’alimentation est une part importante de nos vies, les personnes aimeraient qu’il y ait par exemple davantage de marchés », note Alice Meyer, dont l’association vise aussi à redonner l’envie de se mettre au fourneau. Pendant la crise sanitaire, de nombreux Français y ont retrouvé goût en cuisinant en famille…

Alors, pour essayer d’y remédier, afin de renouer le contact entre consommateurs et exploitants agricoles, BelleBouffe invite régulièrement des paysans à ses ateliers. Mais encore la coopérative AlterConso, un distributeur de paniers bio dans la région lyonnaise, et l’association Passe-jardins, l’ambassadeur des jardins partagés visant à promouvoir notamment le retour de la nature en ville. ♦

 

Bonus
  • Anciela est une association lyonnaise qui accompagne et soutient les engagements et les initiatives des citoyens en faveur d’une société écologique et solidaire. Elle est auteure du guide Agir à Lyon et ses alentours.