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Êtes-vous dans le coup avec les Scop ?

Par Nathania Cahen, le 14 décembre 2018

Journaliste

Coup de projecteur sur les Scop, Sociétés coopératives et participatives, au nombre d’environ 300 en PACA. Fonctionnement, intérêts, règles, vocation, évolution et spécificités du public provençal : Peggy Capdevielle, déléguée régionale de la délégation des Scop et des Scic de PACA et de Corse, nous dit tout.

 

Marcelle – Sans doute en existait-il déjà beaucoup auparavant, mais nombre d’entre nous a découvert les Scop quand les anciens de L’éléphant, très médiatisés, ont créé leur Scop-Ti à Gémenos…

Êtes-vous dans le coup avec les Scop ? 1Peggy Capdevielle – « En effet, cela existe depuis très longtemps puisque c’est en somme le prolongement des associations ouvrières de production du milieu du 19e siècle. On y retrouve beaucoup des valeurs et principes du compagnonnage, comme la solidarité. La Confédération générale des Scop a vu le jour au début du siècle suivant. En région PACA, la reconstruction qui suit la deuxième guerre mondiale et la forte activité dans le secteur du BTP favorisent leur émergence. Mais il faudra attendre les années 70 et le premier choc pétrolier pour avoir une délégation régionale et une équipe dédiée au montage des projets et au suivi des entreprises. »

 

Au juste, qu’est-ce qu’une Scop ?

« Une société commerciale avec une activité, qui a les mêmes obligations que toute entreprise, y compris la rentabilité ! Mais à la différence des autres, les Scop sont gouvernées par leurs salariés et à ce titre répondent à un certain nombre de règles, comme la démocratie au niveau de la gouvernance ou encore l’élection du dirigeant par l’assemblée des salariés, tous les quatre ans. Le coopérateur est donc à la fois salarié et associé. Une Scop peut également compter un associé non salarié, mais celui-ci sera limité dans sa part de capital et son droit de vote. Il deviendra associé s’il contribue au capital.

Les Scop peuvent se décliner dans toutes les activités. S’il s’en trouve beaucoup dans les services et les activités liées au BTP, d’autres projets touchent à l’exploitation forestière, l’architecture, l’éco-construction, les ambulances, la métallurgie, la restauration de livres… »

En vidéo, c’est bien aussi :

 

Compris. Dès lors, comment se répartissent les bénéfices et comment sont fixés les salaires ?

« Le principe est celui d’une répartition équitable des richesses, qui ne veut pas dire une répartition égalitaire, attention ! Les détails en sont arrêtés en assemblée générale, pour servir au mieux le projet, son devenir, et ses acteurs, tout en gardant une réserve d’argent conséquente dans l’entreprise, de l’ordre de 40% en moyenne dans les Scop. Une garantie nécessaire pour consolider l’entreprise et ses fonds propres.

Concernant les salaires, représentant 25% minimum des bénéfices, ils sont répartis selon des règles et objectifs définis par l’ensemble des salariés (pas d’employés ici). Des dividendes peuvent être redistribués, selon le capital apporté, pour récompenser le risque financier. »

 

Êtes-vous dans le coup avec les Scop ? 2Quelle est la plus ancienne Scop du territoire ?

« La Coopérative de lamanage du port de Marseille et du golfe de Fos, qui a réuni et structuré dès 1946 une centaine des artisans spécialisés dans l’amarrage et le désamarrage des bateaux. »

 

Quel est votre rôle lorsqu’une société est menacée de liquidation ?

« Nous nous rapprochons d’elle et l’accompagnons si elle le souhaite, et quand c’est possible, dans des démarches de reprise des actifs. Il y a de belles histoires qui naissent ainsi, comme ATEM à Marseille ou SECMMI à Avignon, des entreprises industrielles qui ont pu renaître de leurs cendres en 1977 pour la première et 2004 pour la seconde, conserver l’emploi et poursuivre leur activité. Nous pouvons être sollicités, mais nous avons également une démarche de prospection et de veille. »

 

Combien de Scop se créent chaque année dans la région ?

« Le chiffre a gonflé depuis 2012, avec le coup de projecteur donné sur ce modèle par Benoît Hamon, alors ministre délégué chargé de l’Économie sociale et solidaire et de la Consommation. Il y a environ 30 créations par an, ce qui représente entre 150 et 200 créations d’emploi dans la région PACA, qui en compte environ 300 (44% soit 130 dans les Bouches-du-Rhône) représentant en gros 3 000 emplois. »

 

Dans quel contexte ?

« Pour 61%, il s’agit de créations ex-nihilo, à l’image de la librairie La Racine à La Destrousse. Ensuite, 24% concerne la transmission d’entreprises saines lors du départ à la retraite d’un patron qui va privilégier le rachat par ses salariés. Il y a également les reprises d’entreprises en difficulté aux prises avec le Tribunal de commerce. Des associations qui souhaitent évoluer vers un modèle plus commercial ou des entreprises qui changent de statut ; c’est le cas par exemple de ce maraîcher bio de Barbentane qui, l’an passé, a tenu à inclure ses salariés dans son projet d’entreprise « Des pieds et des mains ».

 

Qui compose l’équipe de cette délégation PACA ? Quelles sont ses ressources ?

Êtes-vous dans le coup avec les Scop ? 3« Nous sommes 9 salariés, et parmi nous se trouvent d’anciens experts comptables ou contrôleurs de gestion, avec des compétences pointues. Des gens du chiffre ! Une partie de nos ressources est abondée par la Région, car nous participons à sa dynamique économique et au maintien de l’emploi. C’est complété par les cotisations des Scop, qui à 90% adhérent au mouvement, et de certains services que nous facturons. »

 

Outre l’accompagnement et le conseil, vous proposez également une « boîte à outils » ?

« Nous avons en tout cas des solutions et des produits à proposer. Par exemple Pargest, un fonds de financement (dispositif de capital-risque) qui supplée au manque de capitaux propres des Scop et des Scic de PACA. »

 

Un nouveau modèle, la Scic, émerge. Quelle est sa nature ?

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Créée en 2013, la SCIC Bou’Sol assure l’émergence et l’animation de boulangeries solidaires dénommées “Pain et Partage”.

« La société coopérative d’intérêt collectif, apparue en 2004, repose sur un ancrage territorial et son objet social doit être d’utilité sociale. Elle doit mixer trois types de publics, tous partie prenante dans le processus de décision en tant qu’associé de la coopérative : salariés ou producteurs, bénéficiaires et bénévoles, ou fournisseurs ou autres acteurs de la filière. Cela permet de compiler la viabilité économique, l’intérêt collectif et l’utilité sociale. On en compte 741 en France et une trentaine en PACA. Un modèle de « projet partagé » qui séduit puisqu’il a été adopté par des entreprises comme Enercoop Paca,fournisseur français d’énergie renouvelable, Bou’sol un réseau de boulangeries solidaires, la Friche de la Belle-de-Mai, ChlEAUé, autour des enjeux du petit cycle de l’eau, à Arles, ou Ôkhra, le Conservatoire des ocres à Roussillon, dans le Vaucluse) ». @

 

Bonus

  • Il existe des sites spécialisés par secteurs : la fédération des Scop de la communication , celle des Scop du bâtiment, ou des scop de l’industrie.
  • La répartition des Scop et Scici en PACA-Corse : 44% dans les Bouches-du-Rhône, 18% dans les Alpes Maritimes, 11% dans le Vaucluse, 10% dans les Hautes-Alpes, 7% dans le Var, 4% dans les Alpes de Haute-Provence, 3% en Corse.
  • Contact : la Délégation Régionale se trouve 8, rue des Fabres, Marseille 1er. Tél. : 04 91 90 19 35 urpaca@scop.coop