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Géothermythe 4.0 : la géothermie enseignée aux enfants

Par Régis Verley, le 10 décembre 2021

Journaliste

Dans la famille des énergies renouvelables, il y a le vent, le soleil, les vagues, la méthanisation. Mais bien peu en appellent à la géothermie. Il existe pourtant un réel potentiel à développer par exemple dans le Hainaut et la région de Maubeuge. De l’autre côté de la frontière franco-belge, on l’a bien compris, avec des expérimentations prometteuses. On a même choisi de cibler les plus jeunes, « les citoyens et les décideurs de demain », avec une mallette pédagogique dédiée : Géothermythe 4.0.

 

La géothermie, énergie renouvelable, enseignée aux enfants 1Géothermythe 4.0 est déjà expérimentée auprès d’un panel de jeunes lycéens. La mallette pédagogique sera bientôt à la disposition de tous les enseignants intéressés. On y explique en termes simples que, dans un monde où chaleur et énergies sont rares et chères, il est intéressant de regarder sous ses pieds pour découvrir des ressources encore insoupçonnées. De premières études révèlent ainsi que la région transfrontalière de Maubeuge, à Mons en Belgique, constitue un important puits de chaleur souterraine, directement exploitable grâce à la géothermie pour chauffer écoles, piscines, hôpitaux, logements collectifs ou des entreprises.

« Nous n’avons pas encore d’exemple à proposer sur le territoire français, note Corentin Greuez de l’agence d’urbanisme ADUS, basée à Maubeuge (Nord) etactive sur tout le bassin de la Sambre. Mais, côté belge, s’appuyant sur l’expertise de l’université de Mons, il y a déjà des projets en cours qui confirment l’intérêt de la géothermie ». Responsable du pôle Transitions & Transfrontalier, il est chargé d’études transition énergétique et écologique. « La géothermie a été contestée suite à des mouvements sismiques qui se sont produits à Strasbourg, mais ici le risque est maîtrisé. Cela justifie que nous communiquions sur une source d’énergie méconnue ».

 

De la chaleur pour un hôpital, des entreprises, des cultures…

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À Mons, le projet Géothermia : l’eau chaude du sous-sol chauffera les bâtiments

En Belgique, l’Intercommunale de développement économique et d’aménagement du cœur du Hainaut (IDEA) regroupe 27 villes et communes autour de Mons, l’une des capitales de la Wallonie. S’appuyant sur l’expertise des chercheurs de l’université de Mons, l’IDEA a lancé le « projet de la Porte de Nimy », qui débouchera sur la mise en œuvre, au sein du quartier de l’hôpital Ambroise Paré à Mons, d’un réseau de chaleur alimenté par géothermie.

Un autre projet, Géothermia, va permettre aux sociétés qui s’installeront sur une zone spécialement équipée, de bénéficier de l’eau chaude du sous-sol pour chauffer leurs bâtiments. La chaleur produite pourra servir au séchage de produits agricoles ou sylvicoles. Elle pourra aussi être utilisée pour des entreprises brassicoles, des blanchisseries, des entreprises actives de la chimie et la biopharmacie. Ou encore pour la culture sous serre.

L’IDEA procède par ailleurs à la mise en place d’une unité de valorisation, par séchage géothermique et solaire, des boues de stations d’épuration destinées à l’agriculture. Une fois séchées, les boues seront allégées et leur transport sera plus facile et plus écologique.

 

 

Le Sparkoh! pour développer la culture scientifique

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Activités intelligentes pour les jeunes au Sparkoh! @DR

« La géothermie intéresse, note Corentin Greuez. Dans des secteurs denses comme ceux de Maubeuge, il y a là une source de chaleur en énergie non polluante et renouvelable. De quoi chauffer un quartier, une entreprise, un hôpital et favoriser, comme en Belgique le développement d’entreprises grosses consommatrices de chaleur ».

L’inconvénient, c’est que la géothermie nécessite des investissements lourds. « La rentabilité n’apparaît qu’à plus long terme. Il faut donc des financements importants pour des rendements amortissables sur une dizaine d’années ». Autant dire que se chauffer avec la chaleur du sous-sol n’est pas à la portée d’un simple particulier.

Mais, justement, la région des Hauts-de-France s’intéresse à la géothermie. Elle a même nommé un chargé de mission sur ce sujet. Les municipalités et l’intercommunalité ont commencé à regarder ce qui se passait chez leurs collègues belges. Depuis, des études sont en cours pour vérifier la pertinence d‘investissements géothermiques sur le versant français de la Wallonie. Cet écosystème a stimulé les porteurs du projet Interreg, Géothermythe 4.0, soucieux d’associer le grand public aux recherches en cours.

 

Une friche minière devenue parc d’aventures scientifiques

La frontière ici n’est pas très étanche et les échanges sont nombreux. Côté belge, le gouvernement de la Région wallonne a transformé une friche minière en un centre d’information scientifique. Le Sparkoh! a été conçu en 2000 par l’architecte Jean Nouvel, pour la réhabilitation d’une friche minière du Borinage. Autour de l’ancien puits, on a ainsi vu s’édifier des bâtiments s’inspirant du fonctionnement de l’ancien charbonnage. On y trouve un vaste et unique centre de formation et de développement à la culture scientifique. Les expositions s’y succèdent pour intéresser le plus large public possible. Pour développer, chez les adultes et chez les jeunes, le goût de la science.

Assez naturellement, le Sparkoh! s’est donc inscrit avec l’IDEA, l’ADUS française et l’université de Mons, pour développer un outil de vulgarisation sur la géothermie à destination des enfants et des jeunes. « C’est en commençant par les jeunes qu’on sensibilisera la population à l’intérêt de cette énergie trop méconnue ». Les enfants contribuent à sensibiliser les parents et l’ensemble de la population. Et ils seront peut-être les décideurs de demain.

 

Un projet diffusable

Géothermythe 4.0 : la géothermie enseignée aux enfantsLe programme européen Interreg (présenté en bonus) est destiné à favoriser les échanges et les partages d’expérience transfrontaliers. Il était naturel de passer par lui pour financer et concevoir l’outil Géothermythe 4.0.

Cette mallette pédagogique est simple d’utilisation. Elle contient une présentation vulgarisée de la ressource géothermique, à commencer par l’origine de la ressource, son extraction, son utilisation, ses atouts… Sans oublier sa plus-value indiscutable dans un contexte global de transition énergétique. Destinée aux écoliers de 8 à 12 ans, elle place l’enfant au cœur du jeu à travers une série d’ateliers et d’activités menés en groupe. Le tout reposant sur un référentiel en phase avec les programmes d’enseignement. Elle est également complétée d’une vidéo ludique et d’un flyer présentant le projet.

Reste à la diffuser. « Nous avons pris contact avec les rectorats, raconte Corentin Greuez, afin qu’ils proposent aux enseignants d’utiliser notre outil ». Jusqu’à présent l’accueil est favorable. La géothermie, en vérité, n’est pas réservée aux habitants du Hainaut. Il existe en France d’autres réserves disponibles et insoupçonnées… « Géothermythe 4.0 » est donc appelée à voyager ! ♦

 

Bonus
  • Interreg. Créé en 1990, Interreg est l’un des instruments clés de l’Union européenne (UE) soutenant la coopération transfrontalière par le biais du financement de projets. Il vise à relever conjointement des défis communs et à trouver des solutions partagées dans des domaines tels que la santé, l’environnement, la recherche, l’éducation, les transports, l’énergie durable, etc. C’est l’un des deux objectifs de la politique de cohésion de l’UE pour la période 2014-2020 (le programme 2021)2027 est en construction). Financé par le Fonds européen de développement régional (FEDER), il dispose d’un budget de 10,1 milliards d’euros investi dans les différents programmes de coopération. La France est impliquée dans 23 programmes de coopération territoriale européenne / Interreg.