Fermer

Karin Huet, ethnologue-écrivaine-poète-voyageuse

Par Marie Le Marois, le 18 août 2020

Journaliste

@Zoé Lamazou

[les engagés] Karin Huet avait toujours rêvé de travailler sur les Calanques, « d’approfondir la joie que j’ai eu à y habiter pendant six ans, dans un cabanon de Morgiou, le plus beau de mes lieux de vie, le plus conforme à mon idéal de rusticité ». En avril dernier, une commande du Parc National des Calanques lui a permis de réaliser ce rêve.

 

Avec sa capacité unique à nous embarquer dans l’univers qu’elle étudie, cette écrivaine-poète nous plonge avec sa rigueur d’ethnologue dans le cœur du Parc. Premier parc périurbain, à la fois maritime et terrestre. Une multitude d’êtres vivants y cohabitent et se racontent dans son dernier livre ‘’Calanques, les entrevues de l’Aigle’’ : le Marcheur, la Plongeuse, la Cabanonnière, la Botaniste, l’Aubergiste, le Préhistorien, le Voileux, l’Écologue, la Garde-monitrice… et l’Aigle de Bonelli.

Appréhender le Parc à travers la réalité de ses usagers

Brouillon auto 55Cet oiseau, qui niche sur une des falaises du secteur, est menacé d’extinction. Il est dans ce livre le narrateur qui mène le dialogue avec 14 protagonistes emblématiques de ce parc. Et incarne Karin par certains aspects – sa clairvoyance, sa vision globale de ce qui l’entoure, sa liberté.

Guidés par ce rapace, on apprend le rôle des herbiers de posidonie et l’importance de la protection du mérou, bien qu’il ne soit plus menacé. On apprend à reconnaître la Sabline de Provence – fleur qui n’existe qu’entre Toulon et Marseille -, et l’histoire fascinante des marins-pompiers dans le parc. Tous sont interdépendants et coopèrent ensemble pour restaurer l’équilibre des Calanques.

Karin souhaite qu’à la lecture de son livre*, plein d’humour et de poésie, chacun se reconnaisse et découvre les autres usagers. Pour encourager le mieux vivre ensemble entre humains mais aussi avec les autres espèces. Pour faire comprendre que le parc est notre patrimoine à tous, qu’on en est tous responsables et que les réglementations, aussi contraignantes soient-elles, sont nécessaires pour la survie de cet écosystème unique.

 

S’évader dans ses interstices avec la poésie de Karin

Pour écrire ce merveilleux récit, cette écrivaine-poète a mené 39 entretiens auprès d’usagers et de gestionnaires du parc, désignés par le Parc National des Calanques. « Sauf le pompier, j’y tenais ». Cette émerveillée porte un grand respect à ce corps de métier, particulièrement le GRIMP, spécialisé dans les interventions en milieu périlleux. « L’année où j’ai emménagé dans la calanque de Morgiou (elle y a vécu six ans fin des années 70 – ndlr), deux pompiers ont trouvé la mort. Tous les jours, en passant devant le monument érigé en leur mémoire, je pensais à eux ».

Avec ces entretiens, dont elle espère avoir transmis la richesse humaine, Karin a découvert des lieux, des usages, des savoirs et parfois des philosophies : « mon univers s’est élargi, ma perception du vivant a évolué… j’espère qu’il en sera de même pour les lecteurs ! ». Elle a aussi découvert un rôle positif pour les chasseurs et le métier passionnant des 25 gardes moniteurs qui arpentent le Parc, « ils font du comptage de la faune, la police, de la sensibilisation, de l’information... »

Et le protéger

Pour illustrer son ‘’conte vrai’’, cette Marseillaise solaire a choisi d’illustrer son ouvrage avec les sublimes ‘’cartes à pied’’ d’Amandine Maria, artiste vitrollaise. À deux, elles parviennent à partager l’énergie de ce territoire immense. Et transmettre le message du parc : « Nous ne sommes pas l’espèce dominante. Si on le considère ainsi, on va à notre perte. L’homme doit tisser une nouvelle relation au vivant – la flore, la faune, le sol, le climat ». Le but ultime est que le Parc fasse tâche d’huile pour faire entrer le vivant dans la ville. ♦

* le 26 septembre à 14h30 signature à la librairie La cardinale, avec Amandine Maria. Le 2 octobre, lecture du livre programmée au coucher du soleil au Mont Rose dans le cadre de L’automne des Calanques.

 

Bonus [pour les abonnés] – Karin Huet – Amandine Maria – Événement Rendez-vous avec la biodiversité – L’auberge de jeunesse La Fontasse

  • Karin Huet a déjà produit un travail ethnographique sur le Bassin d’Arcachon en s’immergeant dans le métier d’ouvrier ostréicole. Cette voyageuse-exploratrice a également écrit sur ses périples. Pour n’en citer que quelques-uns, elle a marché dans le Haut-Atlas Marocain, les îles Féroé et l’Éthiopie, pagayé en Patagonie et dans le Pacifique, hiberné dans un sémaphore à Ouessant, navigué comme matelot à bord d’un remorqueur à voile en Alaska.

 

  • Karin Huet, ethnologue-écrivaine-poète-voyageuse 1
    les Baux de Provence

    Amandine Maria a poursuivi son master en Sciences de l’art à l’École nationale supérieure du paysage à Versailles et à Marseille, pour devenir paysagiste conceptrice. Cette approche à la fois sensible et technique lui a permis de créer une manière de cartographier l’espace en se préoccupant du paysage perçu par le marcheur. Ses  »cartes à pied » (en voir quelques-unes ici) mêlent le point de vue aérien et le point de vue de celui qui vit une expérience dans le temps et le paysage. Si plusieurs organismes en charge de l’environnement et de l’urbanisme se sont emparés de son travail, Amandine Maria mène parallèlement une recherche purement artistique et expose dans de nombreuses manifestations et galeries d’art contemporain.

 

  • « Rendez-vous avec la biodiversité », évènement organisé dans le cadre du programme « Educalanques » porté par le Parc national des Calanques

Sortie nature gratuite au parc du Mugel en août : venez à la rencontre de la petite faune locale à travers la découverte ou redécouverte des arthropodes (insectes, araignées et autres), reptiles et oiseaux, entre autres. Événement gratuit, de 8h30 à 12h30 maximum,Inscription obligatoire, dans la limite des places disponibles à g.gillet@cpie-coteprovencale.fr Plus d’infos ici

 

  • Karin Huet, ethnologue-écrivaine-poète-voyageuseAuberge de Jeunesse La Fontasse, citée dans ‘’Calanques, les entrevues de l’Aigle’’, est une belle découverte. Cette auberge depuis 1946 est un éden au cœur des Calanques. Vue sublime sur la Méditerranée et gestion de l’environnement exceptionnelle : panneaux solaires, éoliennes, citerne d’eau de pluie, tri sélectif et valorisation des déchets. Cet endroit magique nous permet de partir en randonnée, de profiter d’une baignade dans une crique et redécouvrir le plaisir de la simplicité. Pratique : 16,50 euros la nuit, dortoir, cuisine et sanitaires partagés, La Fontasse, Cassis, FB/ Auberge De Jeunesse De La Fontasse. Tél. : 04 42 01 02 72. De Cassis, prendre la D559 vers Marseille et tourner après 6 km sur une petite route à gauche. De Marseille vers Cassis, sur D559, tourner 12 km après la sortie de la ville sur petite route à droite.