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[vélo #1] Le plus intelligent du monde est français !

Par Olivier Martocq, le 8 août 2022

Journaliste

Toutes les 100 millisecondes, la puissance électrique est ajustée à la zone de confort du cycliste ©Iweech

Série d’été // Dans les programmes des candidats à la présidentielle, quelques intentions comme recréer de l’industrie en France font consensus. À ce titre, Iweech est un exemple intéressant. L’entreprise, récente, a été créée en juin 2020. Installée sur ce secteur du vélo que l’on pensait à jamais perdu en raison de coûts de fabrication très bas en Asie. Iweech contourne cependant cette problématique en misant sur les dernières technologies. En effet, son vélo électrique fait appel à l’intelligence artificielle !

[article publié initialement le 04/03/2022]

 

Iweech, des vélos intelligents produits en France 3
Même l’antivol est intelligent, avec trois niveaux d’alerte @Iweech

Les locaux d’Iweech à Marseille sont à l’image de cette entreprise qui a entrepris de révolutionner le vélo. L’atelier au rez-de-chaussée n’a rien de très original. Des ouvriers assemblent cadres, roues, selles… Quand on regarde d’un peu plus près, on voit qu’ils manipulent également des cartes à puce et des réseaux de fils électriques. Jonathan, le chef d’atelier, a d’ailleurs suivi un parcours professionnel original dans le monde du vélo puisque son cursus passe par l’électronique et l’électricité.  « Il faut être minutieux parce qu’il y a des pièces très fragiles comme les cartes électroniques batteries de 36 volts. Il faut donc rester très concentré ».

 

Fierté de l’ouvrier !

Le parcours de montage est original. Chaque ouvrier a en charge deux vélos, assemblés en parallèle. « On a joué la polyvalence. On peut se remplacer et en cas d’absence, ça ne bloque pas – je ne vais pas dire la chaîne car il n’y en a pas ici – la sortie d’un vélo ». Il faut une journée de travail par salarié pour fabriquer la paire d’engins. Et Jonathan de conclure l’échange sur une note philosophique : « Fabriquer, ceux qui ne l’ont jamais fait ne peuvent pas comprendre l’émotion que l’on ressent une fois le travail achevé. Devant ce qui est, pour un ouvrier …son œuvre ! »

 

Vélo intelligent !

Iweech, des vélos intelligents produits en France 2
Christophe Sauvan co-fondateur d’Iweech © Marcelle

Dans cette usine nouvelle génération, le plus important est le bureau d’étude. Puis le suivi en temps réel du paramétrage individuel de chaque deux-roues. « Ce vélo est dit intelligent – et c’est le seul au monde – parce qu’il utilise de l’intelligence artificielle pour gérer l’assistance que l’on apporte à l’utilisateur », explique Christophe Sauvan co-fondateur d’Iweech. Derrière des ordinateurs, des ingénieurs peuvent suivre en temps réel les calculs qui permettent toutes les 100 millisecondes d’ajuster la puissance électrique pour rester dans la zone de confort du cycliste. Il lui suffit de pédaler et l’assistance personnalisée fait le reste, via une liaison satellite comme n’importe quelle application sur un téléphone.

 

 

Le concept de l’apprentissage machine !

Christophe Sauvan est un pédagogue. Face au néophyte qui ne comprend rien, il prend le temps d’expliquer, de vulgariser une technologie très complexe. « Au fur et à mesure que l’on pédale, le vélo apprend et mesure la zone de confort. Je suis bien jusqu’à ce que je transpire. Je suis mal quand je commence à avoir les jambes lourdes. Cette zone de confort varie évidemment selon le cycliste. Le vainqueur du tour de France et la mamie de 80 ans n’ont rien en commun et pourtant le vélo s’adapte à ces deux extrêmes ». À la différence d’un vélo électrique classique où l’utilisateur règle manuellement cette zone de confort grâce à des leviers, tout se fait automatiquement sur le vélo de la start-up marseillaise. L’intelligence artificielle a en effet rentré et analysé les paramètres individuels de chaque utilisateur.

« Aujourd’hui, rouler en ville nécessite une concentration maximale. Ne pas avoir à se préoccuper des vitesses est un vrai plus. Vous n’avez qu’à vous concentrer sur la conduite ou le paysage. La machine va même gérer automatiquement l’intensité de l’effort si la batterie est déchargée afin de maintenir une assistance pour les côtes ».

 

Même l’antivol est intelligent !

Iweech, des vélos intelligents produits en France 4
Au montage, les vélos sont assemblés deux par deux © Marcelle

Parmi les jeunes « techos », Gabriel Sauvan est particulièrement fier de l’antivol mis au point pour ce vélo. « Lui aussi est intelligent », avec trois niveaux d’alerte. D’abord un capteur de mouvement active une alarme si on touche la machine. Pour l’avoir testée, elle émet un son aigu totalement insupportable. Si ça ne suffit pas à dissuader le voleur, vous recevez une notification sur votre téléphone : « attention on vole votre vélo » qui vous permet d’intervenir.

« Mais si malgré tout le vélo disparaît, un tracking se met en place et géolocalise le localise en temps réel. Parallèlement le moteur est coupé. Il n’y a plus d’alimentation électrique et donc le vélo est inutilisable », détaille Gabriel Sauvan.

 

Pôle d’assemblage ou usine à part entière ?

Les vélos à assistance électrique représentent désormais en France un marché de l’ordre de 3 milliards d’euros. Un engouement qui s’explique par les règlementations de plus en plus contraignantes pour les voitures dans le centre des grandes villes. Ainsi que par les aides gouvernementales proposées à l’achat. Dans ce contexte porteur, Iweech a réussi fin 2021 une levée de fonds d’un montant de 2,8 millions d’euros. L’objectif est la sortie de deux nouveaux modèles cette année. Et de tripler la capacité de production cette année pour arriver à 1500 vélos et 10 000 à l’horizon 2024. « Le design et l’ensemble des logiciels sont conçus en France. Les vélos sont totalement assemblés à Marseille à partir de pièces Iweech uniques et déposées. C’est vrai pour le cadre, la potence et la fourche. D’autres composants de haute qualité venant principalement d’Europe (70%) et de Taïwan », reconnaît Christophe Sauvan qui ajoute être à la recherche de partenaires dans l’hexagone, capables de produire l’ensemble des pièces dont il a besoin.

Un mot pour conclure sur l’essai en conditions réelles dans les rues du quartier de Saint-Barnabé. Tout ce qui est promis est là : le coup de pédale ne varie pas, quelle que soit la pente ou la descente. Reste le prix : 2950 euros… ♦