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Noël solidaire, comme celui de Noga à Marseille

Par Olivier Martocq, le 24 décembre 2021

Journaliste

Toute l'équipe de Noga s'active pour préparer paniers garnis et colis @Marcelle

Alors que le samedi est son jour de fermeture hebdomadaire, le restaurant solidaire Noga restera ouvert le 25 décembre avec un menu plus festif qu’à l’ordinaire. Une décision unanime de tous les salariés de l’équipe. En ce jour de Noël, des dizaines de bénévoles vont les épauler pour distribuer plus d’un millier de paniers-repas accompagnés de cadeaux.

 

Des Noëls solidaires, comme celui concocté par Noga à Marseille 1
Dans le centre de Marseille, Noga @Marcelle

À côté de celles des autres établissements situés sur le Cours Julien, vaste esplanade piétonne située à 100 mètres de la Canebière, la façade de Noga détonne. La sobriété est de mise. Pas de couleurs pimpantes. Des inscriptions taguées, mais rien d’artistique. « On est dans l’essentiel », reconnaît Marie-Christine Gillot la directrice de l’association Maavar qui gère le restaurant social. « Tous nos efforts portent sur la cuisine, le matériel. Là on est en train de refaire entièrement le sol car l’ancien carrelage était très glissant. Il a fallu trois ans pour trouver ce budget d’investissement. Reste que la salle qui accueillait jusqu’à 80 convives est actuellement fermée ».

Évidemment, ce restaurant, qui par temps de covid ne sert plus que des plats à emporter, ne figure pas dans les guides touristiques ou gastronomiques. Ses clients sont SDF, demandeurs d’asile, retraités, familles monoparentales aux minima sociaux, étudiants fauchés…

 

« Pour Noël, on ouvre ! »

Des Noëls solidaires, comme celui concocté par Noga à Marseille 3
Marie-Christine Gillot avec Pascal Boulgarian et deux bénévoles @Marcelle

Samedi 25 décembre, comme tous les samedis, le restaurant aurait dû fermer. Doublement fermer même, puisque Noël tombe un jour férié. Non seulement il ne le sera pas, mais l’équipe est de surcroît particulièrement mobilisée pour en faire un jour exceptionnel. Le menu sera ainsi plus festif qu’à l’ordinaire, et même accompagné de cadeaux. Pascal Boulgarian, le chef de cuisine à l’origine de cette « ouverture du cœur », est bien décidé à mettre les petits plats dans les grands. « Il y a eu un véritable élan de solidarité, observe-t-il. Résultat, nous allons travailler des produits de bonne qualité ».

Au menu : terrine de Saint-Jacques, tajine de poulet, fromage et bûche de Noël. « Pour la bûche, un pâtissier nous prête la main et ses fours, car il faut en confectionner un millier. Tout est fait maison ! », précise son assistante, Ghalia Khenfar. Les paniers-repas comprendront également des chocolats, des mandarines, des papillotes, des dattes, des mendiants, des bonbons… « On va essayer d’arriver aux 13 desserts de la tradition provençale », reprend cet homme charismatique, habitué à soulever des montagnes.

 

 

« Merci les bénévoles »

Des Noëls solidaires, comme celui concocté par Noga à Marseille 2
Fred vient chercher ses repas du jour @Marcelle

Côté cuisine, tout paraît sous contrôle à 24 heures du coup de feu. C’est un peu plus compliqué côté logistique. Chaque plat est en effet présenté dans une barquette individuelle. Remplir les paniers-repas demande la mise en place d’une chaîne, avec des postes précis. Là, ce sont des bénévoles qui ont répondu à l’appel. Georgette et Danièle sont motivées malgré le déjeuner familial du 25 décembre. « Il faudra être là tôt. À 11 heures, notre tâche sera achevée », sourient ces deux grands-mères qui poursuivront cette journée marathon dans leurs propres cuisines.

Fred, venu chercher son sac comprenant ses deux repas du jour, fait l’éloge du lien qui s’est créé entre lui, le marginal, et les équipes de Noga. Avec sa tête de « hipster », son blouson de cuir et ses bottes de moto, il détonne dans la file d’attente. « Je ne suis pas à la rue. Le RSA paie mon loyer mais je ne touche pas grand-chose d’autre ». Son histoire ressemble à beaucoup d’autres. Le décrochage progressif à cause d’une addiction à l’alcool. Puis la marginalisation. L’impossible réinsertion. Une vie qui s’écoule en marge de la société.

 

 

Merci les donateurs !

Des Noëls solidaires, comme celui concocté par Noga à Marseille
Toute l’équipe réunie autour du maire, BenoÎt Payan, qui a fait une visite surprise @Marcelle

« Noël ce n’est pas qu’un bon repas », renchérit Marie-Christine Gillot. Grâce à des dons d’entreprises et de particuliers, des jouets et des cadeaux accompagneront en effet les paniers-repas. « Toutes les personnes qui viennent ici sont inscrites. Nous connaissons leur situation familiale et personnelle. Nous sommes ainsi en mesure de faire des colis ciblés ». Kits d’hygiène ou de grand froid vont aux SDF. Paniers garnis, ballotins de chocolats et autres pochettes surprises accompagneront les agapes des autres.

Au chapitre des bonnes nouvelles, cette fois pour les équipes mobilisées le 25 décembre, Noga a été retenu parmi les opérations « Les réveillons de la solidarité » de la Fondation de France. Ce jour férié travaillé sera donc finalement payé. « Une belle surprise, relève Pascal Boulgarian. Mais, ce que je retiens surtout de cette séquence, c’est tous ces gens formidables qui ont donné du temps, des présents, de la nourriture. Pour que ce soit aussi Noël pour ceux qui n’ont rien ou pas grand-chose ».

Cerise sur la bûche, le maire de Marseille est venu incognito. Visite du site, mais aussi rencontre avec les équipes. « Benoît Payan est le premier responsable d’une collectivité à nous rendre visite depuis notre création en 1996 ! », explique Marie-Christine Gillot, émue. Une reconnaissance pour cette équipe qui, depuis le début de la pandémie, a doublé le nombre de repas fournis. Le chiffre donne le tournis. À six en cuisine, en comptant les assistants et plongeurs, 240 000 repas sont réalisés chaque mois au Noga ! ♦

Des Noëls solidaires, comme celui de Noga à Marseille 1
Ghalia Khenfar prépare les cadeaux de ce Noël solidaire @Marcelle

 

  • Maavar est une association française juive, installée à Paris et Marseille. Dans la cité phocéenne, elle a ouvert en 1996 ce restaurant social.