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SOS Trizzy : l’escape game qui incite à produire moins de déchets

Par Philippe Lesaffre, le 26 septembre 2022

Journaliste

L'enjeu ? Faire comprendre au travers d'une expérience ludique et familiale que nous devons modifier nos comportements en matière de déchets ©Pixabay

À Poitiers, un escape game éphémère a été imaginé pour sensibiliser sur la réduction des déchets du quotidien. L’initiative en revient notamment à une société qui accompagne les collectivités et leurs habitants sur la gestion des poubelles.

 

C’est une première qui se déroule à Poitiers, dans la Vienne. Rendez-vous, le 30 septembre et le 1er octobre, devant l’hôtel de ville. Près de 400 personnes sont attendues, durant ces deux jours, pour sauver Trizzy, le panda menacé en raison de la surexploitation des ressources, notamment.

SOS Trizzy : l’escape game qui incite à consommer moins de déchets
Affiche annonçant l’escape game zéro-déchet SOS Trizzy

Nous sommes en 2191, les événements extrêmes, comme les canicules et les orages, rythment le quotidien des Terriens, et les espèces sauvages disparaissent au fur et à mesure. Il ne reste plus que quelques pandas, dont Trizzy, tombé malade après avoir dégusté un bambou pollué.

Les équipes – de 3 à 5 joueurs – disposent de deux heures pour essayer de le tirer d’affaire. La mascotte de « Sos Trizzy », cet escape game sur le thème du zéro déchet a été imaginé par Code 60, spécialiste de jeu d’évasion, ainsi que par l’entreprise Trizzy, qui accompagne les collectivités dans leur gestion et leurs politiques de réduction des déchets.

Voilà l’enjeu : faire comprendre au travers d’une expérience ludique et familiale que nous produisons trop de déchets. Apporter de l’information sur ce que nous jetons chaque jour. Tenter ainsi, à terme, de modifier les comportements des uns et des autres.

 

Sensibiliser sur la réduction des déchets

Les personnes volontaires, qui se seront inscrites pour y participer, auront à résoudre plusieurs énigmes, à différents endroits situés aux alentours de la mairie de Poitiers. « Ils devront manipuler des objets ou fouiller un peu », indique Romain Bouiller, fondateur de la start-up Trizzy, labellisée entreprise solidaire d’utilité sociale – un agrément visant à développer les entreprises de l’économie sociale et solidaire. Lors de notre échange, Romain garde le mystère, reste volontairement flou pour « garder la surprise ». Il indique quand même – avec un petit sourire – que les participants n’auront pas à « sortir les poubelles sur le trottoir ».

Or, plus sérieusement, il est vrai que cela tournera autour de la gestion des déchets. Lui et les siens visent à « sensibiliser sur la thématique du vrac, du compostage, ou encore de la fabrication de produits d’hygiène maison ». Pour cet événement, réalisé en partenariat avec Grand Poitiers Communauté urbaine, Trizzy souhaite insister sur la réduction, la réparation et le réemploi de nos biens usagés ou défectueux, au-delà du simple tri des ordures et des emballages.

 

 

SOS Trizzy : l’escape game qui incite à produire moins de déchets 1
Des associations offrent une seconde vie à certains équipements @Unsplash

La prise de conscience gagne du terrain

Au moment de l’entretien, les réservations étaient déjà presque complètes. On se demande qui sera de la partie. Des personnes au final déjà sensibilisées à la problématique des déchets et ainsi attirées par l’escape game, mis en place en pleine semaine européenne du développement durable (qui n’a de semaine que le nom puisque prévue entre le 18 septembre et le 8 octobre) ? Romain ne l’espère pas. « Elles passeraient un bon moment mais ne découvriraient pas forcément grand-chose. L’impact serait alors nul. Mieux vaut, poursuit-il, des jeunes et des moins jeunes qui ont tout à apprendre. »

La prise de conscience environnementale ne cesse d’évoluer du côté des citoyens, à mesure que l’urgence climatique saute aux yeux. On l’a encore vu cet été, avec les épisodes de canicules, de sécheresse ou les tempêtes qui se sont multipliés…  « C’est vrai, cela progresse, mais il y a encore besoin d’apporter de l’information, d’accompagner les habitants des villes. » C’est justement ce à quoi s’emploie l’entreprise Trizzy, lancée en 2019. « Certains ont par exemple souvent le réflexe de laisser le frigidaire usagé à la déchetterie, alors qu’il pourrait sans doute être réparé, note-t-il. Certains pensent que, sur place, il sera repris, puis réutilisé. Or, il finira sans doute à l’incinérateur… »

 

Mieux connaître son territoire

SOS Trizzy : l’escape game qui incite à produire moins de déchets
Comment recycler tel ou tel bien ? © Unsplasch

Le but du jeu : pousser les habitants des villes que Trizzy accompagne, de Poitiers, à Angoulême, de Bordeaux à Massy en région parisienne, de Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, à Roubaix, de Carcassonne à Toulouse ou encore à La Rochelle, à réaliser le bon geste. Trizzy a mis en place un agent conversationnel virtuel (intégré sur le site des collectivités clientes) pour répondre aux questions des personnes au sujet des poubelles. Comment recycler tel ou tel bien ? Comment valoriser les restes alimentaires ? Trizzy indique quelle est la démarche pour les déchets ou les meubles dont on souhaite se débarrasser. Plus de 1000 objets sont référencés, y compris, d’ailleurs, les plus improbables. Ce qui permet au passage, aux collectivités, de savoir si leur communication autour des déchets est bien comprise, s’il faut amender quelques messages, ici ou là…

Et du côté des utilisateurs, cela leur donne l’opportunité, in fine, de mieux… connaître leur territoire. Car un petit échange virtuel peut s’établir entre le particulier et l’outil conversationnel. Qui n’hésite pas à préciser, avant de mentionner les déchetteries, que l’équipement – tel que la machine à laver – peut être récupéré par des associations ou des structures en vue de lui offrir une seconde vie, ou dans des bornes de grandes surfaces. « Trizzy peut orienter les habitants vers les ressourceries, les magasins de vrac des environs ou encore les composteurs disponibles. » Cela va plus loin : « On donne des idées d’utilisation de déchets, par exemple du marc de café, ou on indique en vidéo comment fabriquer sa propre lessive. »

 

Bon pour la planète, bon pour le portefeuille

Toujours cette idée de changer les mentalités et de limiter la consommation de déchets et d’emballages en plastique, qui terminent leurs courses au fond de l’océan. « Et puis si ce n’est pour sauver la planète, cela peut être dans le but de réaliser une économie. C’est bon pour le portefeuille » Oui, remarque Thomas, l’argument fait mouche. Surtout en ces temps de crise sociale. Avec l’inflation galopante, tout coûte plus cher…

Il y a fort à parier que ce type de conversation pourra avoir lieu pendant une séance au cœur de l’escape game à Poitiers. Au bout de deux jours, 400 personnes auront été touchées. Dérisoire par rapport au nombre d’habitants dans la capitale de la Vienne (88 000 personnes). Alors y aura-t-il d’autres événements de la sorte, ici ou ailleurs ? L’idée est là. « Des collectivités ont montré des signes d’intérêt. » Affaire à suivre, et place au jeu ! ♦

 

Bonus 

La poubelle des ménages. Selon l’Adème, en 2017, du côté des ménages, 440 kg de déchets sont produits par habitant. Cela représente 9% de tous les déchets produits sur l’année. Au sein des ordures ménagères, un tiers est putrescible, dont les restes de cuisine. On considère que 30 kg par personne par an relève du gaspillage alimentaire. D’où l’intérêt de revaloriser les déchets organiques. En 2024, les particuliers devront avoir une solution pour la revalorisation (composteurs dans les environs et porte-à-porte au domicile).

Citéo indique de son côté qu’en 2021 chaque habitant triait 54 kg d’emballages (papier-carton, acier, aluminium, verre) par an en moyenne. 51% des Français recyclent « systématiquement », selon les chiffres. Le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas.

 

La Semaine européenne du développement durable (SEDD). Organisée du 18 septembre au 8 octobre 2022, elle vise à promouvoir la transition écologique à travers la valorisation d’actions locales et la sensibilisation du public au développement durable. Tous les porteurs de projets peuvent désormais s’inscrire sur la plateforme dédiée.

Initiée par la France en 2003 puis organisée à l’échelle européenne depuis 2015, la SEDD vise à sensibiliser aux 17 objectifs de développement durable (ODD) de l’Agenda 2030. Elle encourage une mobilisation concrète à toutes les échelles individuelles et collectives en promouvant, via sa plateforme dédiée, les initiatives en faveur du développement durable : conférences, marchés de producteurs locaux, ateliers créatifs, jardins partagés… Chaque initiative doit concerner un ou plusieurs des 17 ODD qui couvrent tous les domaines de la transition écologique (santé, qualité de l’eau, énergie propre, villes et communautés durables, etc.).