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Une seconde vague de coronavirus va arriver : vrai ou faux ?

Par Hervé Vaudoit, le 7 mai 2020

Journaliste

La communauté scientifique est partagée. Ces derniers jours, de nombreuses voix se sont élevées un peu partout dans le monde pour prévenir d’une possible seconde vague, qui pourrait être plus meurtrière que la première. Mais, dans le même temps, d’autres écartent farouchement une telle hypothèse. Qui croire ? Que nous réserve le déconfinement ?

 

Les faits
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Wuhan déconfinée

Partout où l’épidémie a sévi, c’est-à-dire à peu près partout dans le monde, on n’a pour l’instant observé aucune « 2e vague », que le pays concerné ait ou non confiné sa population. Même à Wuhan, point de départ du covid-19, où les habitants sont de nouveau autorisés à sortir depuis le 1er avril. D’ailleurs, ni les pays où un confinement strict a été mis en place (la Chine, l’Espagne, l’Iran…), ni ceux qui ont préféré n’isoler que les personnes positives (Corée du Sud, Taïwan, Suède…), n’ont observé d’inversion de la courbe, orientée à la baisse dans tous les pays du monde.

Seuls quelques rebonds ont été observés çà et là, mais jamais durables et pour des causes identifiées depuis. Comme, par exemple, le nombre de cas reparti brièvement à la hausse, fin mars à Singapour, après la découverte de « clusters » dans les dortoirs où s’entassent des ouvriers issus de l’immigration. De véritable seconde vague, en revanche, personne n’en a encore vu venir, où que ce soit sur la planète.

 

Ceux qui mettent en garde contre une 2e vague après déconfinement
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Coronavirus

Ces derniers jours, de nombreuses voix se sont élevées un peu partout dans le monde pour prévenir d’une possible seconde vague, parfois même décrite comme potentiellement plus meurtrière que la première, si le déconfinement ne s’accompagnait pas d’un strict respect des mesures barrières – port du masque, lavage des mains, distanciation physique… etc.

À y regarder de près, ces mises en garde émanent pour l’essentiel de structures et institutions réputées sérieuses (le Massachussetts Institute of Technology -MIT, l’université John Hopkins, l’École Polytechnique de Lausanne…), mais elles reposent toutes sur le même type d’instrument : un modèle mathématique prédictif. L’outil a fait ses preuves dans bien des domaines, mais ses défauts sont bien connus, notamment le fait qu’une seule variable erronée dans l’hypothèse de départ et le modèle « tournera » sur de fausses bases, produisant des résultats farfelus. Dans le cas du covid-19, ce qu’on observe, c’est qu’aucune de ces prévisions de 2e vague fondées sur des modèles mathématiques n’a pour l’instant trouvé sa traduction dans les faits.

 

Ceux qui n’y croient pas

Le premier d’entre eux, c’est Didier Raoult, dont les prises de parole agacent nombre de ses confrères et, depuis peu, le ministre de la Santé, Olivier Véran. Dès le départ, c’est-à-dire dès le mois de mars, il a écarté cette hypothèse, « parce qu’il n’y a pas d’exemple probant dans l’histoire des maladies infectieuses, pas plus

Raoult mais aussi l'Immunopôle : Marseille bataille sec contre le Covid 1
Pr Didier Raoult

qu’il n’y en a eu avec les coronavirus précédents comme le SRAS », souligne le Pr Philippe Parola, un des infectiologues de l’équipe marseillaise. Mais les médecins de l’IHU Méditerranée Infection ne sont pas les seuls à rejeter la possibilité d’une 2e vague épidémique.

Il y a deux semaines, le Pr Jean-François Toussaint, directeur de l’Institut de recherche biomédical et d’épidémiologie du sport (Irmes), a jugé « incertaine » la survenue d’une seconde vague, après avoir compilé toutes les données et tous chiffres des pays touchés, France comprise. Il en déduit la même chose que Didier Raoult, sans d’ailleurs susciter de réactions franchement hostiles : un rebond a très peu de chances de se produire, le profil de l’épidémie étant assez semblable à toutes celles qui ont précédé (grippe, SARS, H1N1…), à savoir une courbe en forme de cloche, sans reprise ultérieure. Mieux : à l’instar de Didier Raoult, qui s’était attiré les foudres des autorités sanitaires en qualifiant dès la mi-mars les mesures de confinement de « moyenâgeuses », Jean-François Toussaint doute de l’efficacité desdites mesures, puisque les pays ayant confiné leur population n’ont pas mieux maîtrisé la circulation du virus et leur taux de mortalité n’est pas meilleur, voire plus mauvais, que celui des pays qui se sont contentés d’isoler les personnes testées positives.

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La distanciation physique

Ce qui, en revanche, ne semble pas contesté, c’est l’impact positif des gestes barrières, qui doivent impérativement être maintenus, qu’on ait ou pas été confinés à la maison, après le déconfinement. C’est d’ailleurs la seule hypothèse retenue par Jean-François Toussaint pour une 2e vague : que l’on observe un relâchement total de la population vis-à-vis des gestes barrières une fois le déconfinement acté. Au bout du compte, « la seule question qui reste en suspens, assure le Pr Philippe Parola, est de savoir si le covid-19 va faire comme le SRAS, c’est-à-dire disparaître avant la fin du mois de mai, comme le font à peu près tous les virus respiratoires, ou s’il va venir s’ajouter à la liste des 5 coronavirus et des 19 virus respiratoires que l’on connaît et qui reviennent chaque année ou de temps à autre, sans que l’on sache précisément pourquoi. »

À l’IHU Méditerranée Infection, en tout cas, l’épidémie semble bien en passe de s’éteindre, comme le pronostiquait Didier Raoult il y a trois semaines. Sur les 75 lits d’hospitalisation de l’établissement, seuls 20 sont encore occupés par des patients covid-19, en grande majorité des personnes âgées contaminées tardivement dans les Ehpad ♦