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La Cravate Solidaire à Marseille : limiter la discrimination à l’embauche

Par Benjamine Lobier Milliat, le 16 mai 2023

Journaliste stagiaire

Une quarantaine de bénévoles œuvrent toute l’année pour aider les demandeurs d’emploi @Lacravatesolidaire

Depuis janvier 2022, la Cravate Solidaire est présente à Marseille. Lancée à Paris, cette association se déploie maintenant dans treize villes. Son objectif : œuvrer pour l’égalité des chances à l’embauche. Immersion dans les locaux marseillais.

 

Dans la rue Bernard du Bois, perpendiculaire à la gare Saint-Charles, Mathieu Delot multiplie les allers-retours. Il pousse un caddie rempli de boîtes de chaussures et de sacs de vêtements. « Parfois cest moins la course, mais aujourdhui tous les dons de vêtements sont arrivés en même temps », plaisante lunique salarié de la Cravate Solidaire à Marseille. Une fois le va-et-vient des caddies terminé, Mathieu prépare la cafetière et quelques biscuits pour accueillir les premiers participants à latelier Coup de pouce du mardi.

La Cravate Solidaire est une association nationale. Elle œuvre pour l’égalité des chances et lutte contre les discriminations à lembauche. Son objectif : permettre à des personnes, le plus souvent en situation de précarité, de réussir leurs entretiens professionnels.

Mathieu Delot est le responsable du développement de lantenne marseillaise. Lillois dorigine, cest grâce à une mutation alors quil était encore chargé de projet dans lAgence pour l’éducation par le Sport quil a atterri dans la cité phocéenne. Semblable au célèbre slogan de McDonalds, « venez comme vous êtes », pour Mathieu cest : « qui veut, vient. Ici on reçoit tous types de personnes de différentes origines et avec différents projets ».

 

« Des vêtements qui leur plaisent et leur correspondent »

La Cravate solidaire à Marseille : limiter la discrimination à l’embaucheLes mardis et jeudis après-midi, la Cravate Solidaire organise des coachings « Coup de pouce » ouverts à tous. Nicolas patiente dans la petite salle à lentrée en attendant d’être reçu. Cest sa conseillère en insertion qui lui a proposé de venir assister à lun d’entre eux.

Dix à quinze personnes se rendent chaque semaine aux ateliers. « Ils sont organisés en quatre étapes : laccueil pour décompresser, lessayage des vêtements qui leur plaisent et qui leur correspondent, la simulation dentretien puis la photo de CV pour se sentir beau ou belle », indique Mathieu Delot. En tout, ce sont quatre bénévoles qui pilotent chaque session. Deux occupent la place des coachs « image » et deux autres celle des « RH ».

Nicolas entre dans le dressing de gauche, consacré aux vêtements masculins, et retrouve Célia qui ly attend. Célia Martin est bénévole pour la Cravate solidaire, lorsquelle na pas cours aux Beaux-Arts de Marseille. « Ce qui ma plu dans cette association, cest son approche ludique », explique-t-elle en arpentant les rayons du dressing.

Le jeune homme de son côté se débarrasse de son sweat-shirt et de sa casquette. Il se prépare à enfiler un premier costume. Du haut de ses 23 ans, il n’hésite pas à choisir les pièces parmi celles proposées par Célia. « En ce moment, je travaille dans ladministratif. J’essaie de décrocher un entretien dans le prêt-à-porter, donc javais besoin dun costume », confie Nicolas tout en se regardant dans le miroir.

 

 

Deux dressings, un studio photo et des salles pour passer des simulations dentretien

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Le studio photo installé au premier étage de l’antenne marseillaise @Marcelle

Les vêtements que la Cravate solidaire propose proviennent des dons de particuliers, de sociétés mécènes qui organisent des collectes internes auprès de leurs salariés, mais aussi des entreprises qui offrent leurs invendus. Au détour des rangées des dressings, il est possible de tomber sur de belles pièces neuves qui proviennent de marques comme Zadig&Voltaire ou encore The Kooples.

Finalement, Nicolas a trouvé son bonheur et se prépare à passer sa simulation dentretien. « Quand tu les vois repartir avec leurs costumes, le sourire aux lèvres cest cool. Parfois, on arrive même à leur faire changer limage quils ont deux-mêmes », se réjouit l’étudiante aux Beaux-Arts.

Mathieu Delot, lui, s’active pour sassurer que tout se passe bien et que personne ne manque de rien. Charles linterpelle après avoir enfilé lui aussi un costume. « Tu es canon comme ça », lui lance le responsable du développement de lantenne. Charles est un ancien assistant de direction. Il vivait dans la rue depuis quelques mois et a réussi à retrouver un appartement. « Charlesattendait devant la porte des locaux à partir de 10 heures ce matin. Il nous a expliqué quil avait un entretien dembauche à 15 heures et quil avait besoin dune tenue vestimentaire conforme », explique Mathieu en le regardant se diriger vers la salle de simulation dentretien dembauche.

 

Un suivi personnalisé

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@Marcelle

La Cravate solidaire essaie de garder le lien avec les demandeurs d’emploi passés par l’antenne. Si trois mois après avoir participé au coaching, ils n’ont décroché aucun poste alors lassociation leur propose de revenir pour faire le point. En tout, cest 60 à 70% de personnes qui retrouvent un travail après être passé par la Cravate solidaire.

Très sollicité par différentes associations, la Mission locale notamment, Mathieu Delot pense quil devra mettre un troisième créneau hebdomadaire en place. Trouver davantage de bénévoles et de vêtements, pas de quoi effrayer le Lillois dorigine. « Tant quils repartent avec le sourire, cest lessentiel », confie Mathieu Delot en souriant lui aussi. ♦

*La Fondation de France – Méditerranée parraine la rubrique Société et partage avec vous la lecture de cet article*

 

Bonus

  • Témoignage : Nathalie a découvert la Cravate solidaire grâce à Marcelle et a livré à l’association les costumes de son beau-père décédé.

« Jai appris lexistence de la Cravate solidaire grâce à un article de Marcelle paru il y a plusieurs mois. Jai vu que lassociation était positionnée spécifiquement sur le don dhabits pour les personnes qui se remettent dans le monde du travail. Il y a eu un décès dans ma famille, nous avons donc décidé de donner les vêtements habillés à la Cravate solidaire. Ce qui ma plu chez cette association, ce sont leurs actions ciblées et concrètes pour ceux qui sont à la recherche dun emploi. Cest le fait daider des gens qui nont peut-être pas les moyens de shabiller comme il le faut pour prospecter pour un travail qui ma touchée. Lidée, c’était de leur donner des affaires de qualité qui puissent les mettre en valeur.

Je vais en parler pour faire savoir que les gens peuvent donner des vêtements spécifiquement à cette association. »

  • Devenir bénévole, et pourquoi pas ? Lassociation est preneuse de dons de vêtements comme chemises et chemisiers, pantalons, vestes de costume, cravates et surtout chaussures et ceintures… Ce dont lantenne a le plus besoin, c’est de nouveaux bénévoles. Pour réussir à répondre à tous ses besoins et casser les codes dans le milieu de l’accès à l’emploi.

Pour les contacter marseille@lacravatesolidaire.org ou visiter leur site web.