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Revive, un exemple durable dans l’industrie de la mode

Par Virginie Menvielle, le 5 octobre 2023

Sur les penderies se serrent des robes créées dans d’anciennes chemises d’hommes, des manteaux ultra-courts réalisés à partir de leurs versions longues, des gilets matelassés… © DR

Depuis début 2020, Yolande Klaassen donne une seconde vie aux invendus du prêt-à-porter en les transformant complètement. Avec ses pièces uniques réalisées en petites quantités, non seulement elle intègre les grandes enseignes du textile, mais montre qu’un autre chemin est possible pour l’univers de la mode. 

Chemise large bleue à empiècements fleuris, jean cintré, lunettes qui retiennent ses cheveux blonds mi-longs, Yolande Klaassen aime la mode et ça se voit. Il faut dire que la Britannique a toujours travaillé dans le textile. « Dans une autre vie », comme elle aime à le dire, Yolande a fait carrière chez de grandes marques comme Marks&Spencer et Timberland jusqu’en 2019. Là, arrive la prise de conscience. 

 

Elle transforme les invendus des grandes marques 

Suite à la mutation de son mari, la cadre supérieure pose ses valises à Lille et se rend compte que ses valeurs ne sont plus en accord avec le marché du textile et le poste qu’elle occupe. « Je voulais changer les mentalités, mais je ne savais pas du tout ce que je pouvais faire. Je ne suis pas couturière, pas modéliste… Moi, j’aime les beaux produits que j’ai toujours gardés longtemps », raconte Yolande Klaassen. Elle tient une piste : elle va donner une seconde vie aux invendus des grands noms du prêt-à-porter. « J’avais le réseau qu’il fallait pour me lancer. J’ai travaillé avec ceux qui détruisent leurs invendus à l’autre bout du monde ». Yolande se mue en cheffe d’entreprise et lance Revive, début 2020. 

Yolande a présenté la collection Revive au Printemps Haussmann à Paris.
Yolande a présenté la collection Revive au Printemps Haussmann à Paris.

Au début, elle propose des pièces uniques pour sa propre marque, Revive. Le process est toujours le même. Le nouveau vêtement ne doit absolument pas ressembler à l’ancien. Elle illustre la philosophie de Revive par un exemple  : « On vient de sortir une ligne de sweats femme. Nous sommes parties de sweats hommes, que nous avons entièrement démontés. On a mixé des pièces de différentes couleurs, et créé un modèle femme avec des manches chauve-souris et une coupe très courte, beaucoup plus actuelle. » 

 

Des pièces de mode made in Roubaix au Printemps Haussmann 

Derrière les pièces créées par Revive, des petites mains qui viennent d'ateliers d'insertion situés à 15 km de Lille.
Derrière les pièces créées par Revive, des petites mains qui viennent d’ateliers d’insertion situés à 15 km de Lille.

Sur ses penderies se trouvent pêle-mêle des robes créées dans d’anciennes chemises d’homme, des manteaux ultra-courts réalisés à partir de leurs versions longues, des gilets matelassés… Et pas question pour la cheffe d’entreprise de proposer des produits upcyclés fabriqués à l’autre bout du monde. Yolande s’est lancée dans cette aventure pour « avoir un impact ». « Je ne fais pas cela pour qu’on se souvienne de moi. Je me fiche d’être instagrammable. Moi, c’est l’économie circulaire qui me fait vibrer », souligne-t-elle avec conviction. Aussi, la Britannique ne travaille qu’avec des professionnel.les situé.es à moins de 15 km de chez elle. 

« Je connais chaque personne qui touche à mes produits. Cela fait partie de ma chaîne de valeurs », confie avec fierté la fondatrice de Revive. Son équipe, composée d’une alternante en charge de la communication, d’une styliste et d’une modéliste toutes deux en freelance, vivent toutes dans la Métropole lilloise. Quant aux petites mains à la confection, elles travaillent dans des ateliers indépendants ou dans des entreprises d’insertion situées à Roubaix, Tourcoing… « Une de mes collaboratrices n’avait pas de boulot avant. Maintenant, elle est fière de travailler pour des pièces qu’on peut retrouver à Euralille ( le plus grand centre commercial lillois ), ou encore au Printemps Haussman à Paris ». 

 

« J’ai envie que Revive soit une vitrine du possible »

Aujourd’hui, l’équipe de Yolande travaille essentiellement pour les marques qui souhaitent créer elles-mêmes des capsules upcyclées. « On collabore avec La Gentle Factory (qui appartenait anciennement au groupe Mulliez), avec les enseignes Jules, Deviane, le Printemps… ». Mais la situation fragile du monde du textile a privé Revive de très belles opportunités cette année. La toute jeune entreprise devait en effet collaborer pour des enseignes… qui ont mis la clé sous la porte. « Si tout s’était passé comme prévu, nous aurions eu 30% de croissance. C’est ce que j’espère pour 2024 », lance Yolande avec optimisme. La cheffe d’entreprise n’arrive pas à dégager plus de 100 000 euros de chiffre d’affaires pour le moment.

Yolande Klaassen souhaite faire changer les mentalités dans l'industrie de la mode.
Yolande Klaassen souhaite faire changer les mentalités dans l’industrie de la mode.

Elle explique : « Je couvre mes frais et je paye tout le monde. Je bosse six jours et demi par semaine, et je ne me verse pas de salaire, à mon âge ! Ce n’est pas pour une question d’argent que je fais cela, mais parce que je veux avoir un impact positif sur la planète et dans la vie des gens ». Pour y parvenir, elle participe avec la Fashion Green Hub – association roubaisienne qui compte 450 personnes soucieuses de changer l’industrie de la mode – à la création d’outils d’annotation sur les produits de mode, à la manière des Nutri-scores.

« L’idée est de mettre des étiquettes en fonction de la provenance des produits, et pas seulement des matières utilisées. Moi, je travaille beaucoup avec du denim par exemple, très consommateur d’eau. Mais pas de produits neufs, les miens ont déjà vécu, et sont donc beaucoup moins polluants » insiste Yolande qui met en avant sa volonté farouche d’agir. « J’ai envie que l’on soit un peu les cobayes avec ma marque. Que l’on soit une vitrine du possible ».