Une exposition sonore originale fait entrer les problématiques de santé mentale dans les collèges, lycées et autres médiathèques.Tête-à-tête, c’est quatre épisodes d’une quinzaine de minutes pour quatre témoignages de jeunes partageant leur vécu. Le résultat d’un appel à projet de la Cité éducative Paris 18e et le Centre intersectoriel d’accueil pour adolescents (Ciapa) remporté par le studio marseillais Clap Audio.
Des silhouettes dans un environnement très graphique, fait d’escaliers et de courbes, de superpositions de plans mêlant les tons rouges, bleus, violacés… Chacune des quatre œuvres qui composent l’exposition Tête-à-tête est à la fois anguleuse et enveloppante. Signées Louise de Crozals, illustratrice et graphiste à Lyon, elles ont vocation à être affichées dans des collèges et lycées, des médiathèques, des centres sociaux… Bref, des lieux accueillant un public adolescent.
Leur mission ? Toucher ces jeunes par le beau. Attirer leur attention pour les amener à scanner le QR code qui les accompagne et les emmène vers le témoignage audio d’un autre ado. Car Tête-à-tête a cette particularité d’associer la vue et l’ouïe. C’est une expo-podcast en quatre temps donc : quatre illustrations, quatre épisodes, quatre récits. Elle a été imaginée par le studio marseillais Clap Audio (voir bonus) à l’occasion des 34e Semaines d’information sur la santé mentale (SISM). Il y est question de bipolarité, de transidentité, de trouble de conversion psychologique, de mal-être, de dépression, de pensées suicidaires, de psychiatrie, d’hospitalisation ou encore de rémission.
Un problème de santé publique
Des sujets et surtout une forme originale choisis pour répondre aux attentes de la cité éducative Paris 18e (voir bonus). Cette structure avait lancé un appel à projets très ouvert pour « faire émerger des solutions innovantes sur des problèmes identifiés » rembobine Héloïse Pierre, co-fondatrice et présidente de Clap. « Ici c’était la santé mentale des ados. » « La question a explosé dans les établissements scolaires, car les adultes ne sont pas formés à ça. Ils se sentent ultra démunis, explique Alix Boyer, qui a réalisé ce podcast. Ils aimeraient au moins savoir détecter les signaux et recevoir la parole. »
C’est que le mal-être a gagné beaucoup de terrain. Selon Santé publique France (SPF), la santé mentale des adolescents (11-17 ans) et des jeunes adultes (18-24 ans) se dégrade en effet depuis 2020. De plus, ces problématiques restent taboues. Pour tenter d’enrayer cette tendance, SPF vient notamment de mettre en place le dispositif « Le Fil Good ». Cinq vidéos pédagogiques et ludiques conçues pour les réseaux sociaux. Dont une plus particulièrement destinée aux 11-17 ans, afin de promouvoir des comportements favorables à la santé mentale comme l’activité physique ou la gratitude.
Une démarche innovante
« Nous, on a voulu donner la parole à des jeunes parce que c’est souvent très descendant les messages de sensibilisation, poursuit la cheffe de projet. On a misé sur l’identification et l’émotion. Semé de petites graines pour éloigner des préjugés, libérer la parole, déstigmatiser. Ce sont des parcours lourds, avec une prise en charge médicale et psychiatrique… Donc, l’idée c’est aussi de dire que plus on s’y prend tôt, plus vite on en sort. »
Et on s’en sort, les témoignages le prouvent. Si tous racontent leurs difficultés avec sincérité et clarté, tous expriment aussi leurs victoires. Ils ont en commun d’avoir été suivis par le Ciapa (Centre intersectoriel d’accueil pour adolescents – lire bonus), partenaire de ce projet. Et d’avoir été volontaires pour se confier. Cela donne quatre récits touchants, purs, sobrement mis en musique. Des récits condensés en une quinzaine de minutes pour ne pas perdre l’attention d’un auditorat plutôt volatil.
Une expo amenée à voyager
Une prise de parole impactante, d’après Alix Boyer, qui a assisté à l’installation de cette expo hybride au collège Georges-Clemenceau à Paris en octobre dernier. « Présentée à six classes de 4e, elle a soulevé beaucoup d’intérêt et de questions », se réjouit-elle, soucieuse désormais de la faire vivre, donc circuler. Clap Audio propose ainsi aux structures intéressées d’acquérir les panneaux avec les QR code pour une expérience globale. Les témoignages et visuels (en vignette) sont d’ailleurs accessibles sur les plateformes de téléchargement de podcasts ou sur le site du studio. Des tirages sont déjà partis en Bourgogne, dans le Nord, à Annecy ou encore à La Rochelle. ♦
*La Criée, Théâtre national de Marseille, parraine la rubrique éducation et vous offre la lecture de cet article*
Bonus
[pour les abonnés] Clap Audio – La CIté éducative Paris 18e – Le Ciapa –
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- Clap Audio. Né en 2019, Clap Audio se définit comme un « studio de création d’expériences auditives et immersives ». Il produit notamment les podcasts récurrents. Comme Mamie dans les orties, Envolées contées et Le cul de poule d’Éloïse ainsi que La buissonnière dont la saison 2 est en cours. Par ailleurs, il réalise des contenus pour des entreprises, des associations ou encore des offices de tourisme.
- La cité éducative Paris 18e . Initiées par l’Etat en septembre 2019, les « cités éducatives » labellisées « visent à intensifier les prises en charge éducatives des enfants et des jeunes, de la naissance à l’insertion professionnelle. Avant, pendant, autour et après le cadre scolaire. Elles consistent en une grande alliance des acteurs éducatifs dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) : parents, services de l’État, des collectivités, associations, habitants. » De plus, elles bénéficient de moyens supplémentaires pour les fédérer.
Depuis 2022, l’une d’entre elles couvre ainsi 3 collèges et 29 écoles du 18e arrondissement de Paris situés dans des QPV. Elle est pilotée par la préfecture, l’académie de Paris et la mairie et gérée par la Ligue de l’enseignement. À Marseille, ll existe 4 cités éducatives à Marseille : Nord Littoral, Malpassé Corot, Centre ville Les docks et Bon secours Les Rosiers.
- Le Ciapa. Le Centre intersectoriel d’accueil pour adolescents prend en charge les jeunes souffrant de difficultés psychiatriques. Il fait partie du GHU Paris (groupe hospitalier universitaire), premier acteur hospitalier parisien des maladies mentales et du système nerveux.