Fermer

La recyclerie qui donne une seconde vie au matériel médical

Par Patricia Guipponi, le 20 juillet 2023

Journaliste

Plus de 8000 aides techniques qui varient selon les besoins exprimés ©DR

Dans l’Ouest-héraultais, l’association Le Bon Sens du Ré-Emploi collecte, puis remet en état et sur le marché, le matériel technique adapté à la perte d’autonomie. Fauteuils roulants, déambulateurs ou encore aides aux repas et à la toilette sont reconditionnés et accessibles à prix réduit plutôt que jetés. Rencontre avec une équipe de bénévoles motivés.

 

« Un petit café ? » Sylvie Joviado tend un mug à Joël qui s’active dans l’atelier de réparation où des bannettes de pièces détachées, bien rangées, s’entassent sur de hautes étagères. L’homme vient de démonter un fauteuil roulant qui ne pourra plus servir, mais dont certaines parties seront réutilisées. C’est son travail au sein de l’association Le Bon Sens du Ré-Emploi, dont les locaux se trouvent à Sauvian, dans l’ouest de l’Hérault. Il est secondé dans sa tâche par Adrien, technicien salarié en contrat aidé.

La structure, forte de vingt-cinq bénévoles, est présidée par Sylvie. C’est elle qui a imaginé cette recyclerie de collecte, de reconditionnement et de location-vente à prix réduit, d’équipements adaptés ou spécialement conçus pour prévenir ou compenser les situations de perte d’autonomie liées à l’âge, au handicap et/ou à la maladie. Autrement dit, le matériel qui transite par l’association comprend des déambulateurs, des réhausseurs, des téléphones à grosses touches, des aides à la toilette ou encore des lits médicalisés.

Le Bon Sens du Ré-Emploi, la recyclerie qui donne une seconde vie au matériel médical 1
Joël est le touche-à-tout réparateur des équipements à reconditionner ©PG

 

43% des besoins en aides techniques ne sont pas couverts en France


Sylvie Joviado a tellement cru à son projet qu’elle a tout lâché pour s’y investir pleinement. Auparavant, elle a travaillé comme cadre de santé dans le secteur privé et comme conseillère dans le développement durable. Elle sait donc où elle met les pieds. « J’avais besoin d’œuvrer dans quelque chose de plus concret, qui ait du sens ». Elle lance la ressourcerie en octobre 2021. Mais les activités, freinées notamment par le Covid-19, ne démarreront sereinement qu’un an plus tard.

Le Bon Sens du Ré-Emploi, la recyclerie qui donne une seconde vie au matériel médical
L’équipe de bénévoles du jour rassemblée autour de Sylvie (à droite), fondatrice de la
recyclerie ©PG

L’objectif de la recyclerie est de faciliter l’accès au matériel médical à ceux qui ont des revenus modestes ne pouvant financer le reste dû à l’achat, une fois la partie remboursée par l’Assurance maladie soustraite. « Parfois, ce reste peut être très important. On estime que 43% des besoins en aides techniques ne sont pas couverts en France ». Cela permet aussi à ceux qui le désirent de bénéficier d’un second équipement à bas prix. « Notre matériel reconditionné est à 30% du prix du neuf », indique Sylvie Joviado. C’est également une alternative pour ceux qui privilégient les articles de seconde main par souci de gaspillage.

La durée de vie moyenne d’un équipement est de huit ans. En principe, il est utilisé entre six et vingt-quatre mois avant d’être jeté ou parqué dans un coin. Très souvent dans un état irréprochable. À défaut de reconditionner l’ensemble du matériel collecté, Le Bon Sens du Ré-Emploi en récupère les pièces. Elles sont réutilisées pour réparer d’autres équipements. « Prenons le cas d’un fauteuil roulant. Il en faut trois pour en refaire un ». Et ce qui ne peut plus servir part dans des filières de revalorisation.

 

 

Un service de maintenance, de révision et de réparation sur site

La collecte du matériel se fait via les dons de particuliers, d’établissements de santé et de services médico-sociaux. Puis, les équipements sont triés, nettoyés, contrôlés et réparés. Ce qui est réemployable est aseptisé dans des conditions de désinfections similaires à celles effectuées en milieu hospitalier. Une fois emballé, le matériel est stocké avant d’être proposé à la vente.

la location est également possible. « Il arrive en effet que la nécessité d’un équipement ne soit que ponctuelle ou que le matériel doive être testé avant l’achat. La location permet de faire des économies non négligeables », observe Sylvie Joviado. L’équipe de la recyclerie propose également un service de maintenance, de révision et de réparation des aides techniques. Il s’adresse aux particuliers comme aux établissements. « C’est à cet effet que nous prévoyons d’acheter un utilitaire*. Cela nous permettra d’œuvrer directement sur site ».

Et ce n’est pas tout. La fondatrice de la recyclerie souhaite pouvoir créer des emplois localisés. « La plus grande partie du travail est assurée par des bénévoles, dont je fais moi-même partie. Notre but est de développer nos activités pour pouvoir embaucher du personnel en situation de réinsertion sociale », confie encore cette femme de conviction, qui espère que la ressourcerie bénéficiera d’un agrément d’établissement adapté pour employer également des personnes en situation de handicap. ♦

*En juin dernier, le Crédit Mutuel Méditerranéen a attribué une aide à l’association dans le cadre de l’édition 2023 du concours régional « 4S Semeur d’innovation ». Elle servira à l’achat de l’utilitaire.
Le Bon Sens du Ré-Emploi, la recyclerie qui donne une seconde vie au matériel médical 3
Les dons proviennent de particuliers et d’établissements de santé et médico-sociaux ©P

 

Bonus
  • Vers une filière départementale de réemploi des aides techniques. Dans l’Hérault, 25 000 aides techniques médicales vont au rebut chaque année. Cela représente 275 tonnes de déchets. Ce qui est dommageable sur le plan économique et environnemental. Une expérimentation sur trois mois a donc été menée pour juger de la pertinence d’une plateforme ressourcerie de réemploi de ce matériel sur le territoire. Elle a été initiée par la Conférence des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie (CFPPA), qui coordonne dans chaque département les actions en faveur du bien vieillir des plus de 60 ans.

L’association Le Bon Sens du Ré-Emploi s’est associée à cette observation. « Cela nous a permis de démontrer que notre modèle économique avait son utilité », confie Sylvie Joviado. Une bonne moitié du matériel récolté durant le trimestre pilote et reconditionné va équiper des établissements médico-sociaux et des particuliers nécessiteux. Le reste a été récupéré pour être réutilisé ou revalorisé.  Le réel succès de cette expérimentation a débouché sur la récente création de la plateforme Recycl’Aide 34 à laquelle prend part Le bon sens du ré-emploi en partenariat avec Présence verte services et Abeille Verte, entreprise à but d’emploi située à Lodève.

 

 

YouTube player