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Des solutions pour compenser la dyslexie

Par Lorraine Duval, le 22 juin 2023

Journaliste

Les déficits dans la lecture sont la meilleure expression de la dyslexie, avec un déchiffrage des mots lents et laborieux ©Pixabay

La dyslexie est cette difficulté à lire et à écrire qu’éprouve une partie de la population, entre 5 et 10% des Français. Beaucoup de dyslexiques vivent mal leur scolarité, souvent par manque de confiance en soi, mais développent de vraies capacités d’adaptation. De son côté, l’école propose toujours plus d’outils et de dispositifs d’accompagnement.

La dyslexie est répertoriée comme une maladie dans la classification internationale de l’Organisation mondiale de la santé (lire bonus). Pourtant, les personnes qui en souffrent ne se sentent pas malades. C’est un « trouble spécifique des apprentissages » (TSA) qui se manifeste au travers d’au moins l’un de ces symptômes : une lecture des mots inexacte, lente ou pénible ; une compréhension malaisée d’un texte ou de consignes et/ou des difficultés à épeler un mot et dans l’expression écrite (grammaire, ponctuation, construction…).

 

5 à 10% des Français en sont atteints


C’est ce qu’indique un rapport de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) de 2017. De plus, de récentes études corroborent ces chiffres plutôt stables. « Il n’existe pas de dépistage systématique pendant l’enfance, mais des enseignants et parents attentifs ou inquiets. Parfois trop, car on nous adresse ainsi des enfants qui sont simplement perturbateurs ! », indique Domitille Weber. Cette orthophoniste de Rocbaron (Var), est également Secrétaire générale du Syndicat des orthophonistes de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur Corse (SDORPACAC).

 

L’apprentissage de la lecture est le principal révélateur de ces troubles

Les déficits dans la lecture en sont la meilleure expression, avec un déchiffrage des mots lents et laborieux. C’est donc à l’école élémentaire, lorsque l’apprentissage de la lecture a démarré, vers l’âge de 6 ans, que le dépistage est possible. Mais un enfant discret ou doué d’un haut potentiel (on dit qu’Einstein est le plus célèbre des dyslexiques !) peut très bien passer inaperçu… tant qu’il ne se retrouve pas dans une situation où il ne parvient plus à compenser par sa seule intelligence. Il pourra, par exemple, se retrouver en difficulté pour effectuer un travail chronométré. L’enfant dyslexique peut aussi avoir du mal à apprendre les tables de multiplication.

Ce trouble n’ est pas d’origine psychologique, mais est relié au système nerveux central : certaines aires du cerveau fonctionnent différemment. Pour autant, la dyslexie peut engendrer des troubles psychologiques, des dépressions notamment, souvent induits pas un manque de confiance.

 

 

Il n’existe pas de traitement, mais des outils

Même si le handicap ne disparaît pas, il existe des moyens pour remédier à la dyslexie, à mettre en place le plus tôt possible. Cela passe par une période intensive de séances d’orthophonie (50 séances de 30 minutes minimum, prescrites par un médecin). « Certains préfèrent des prises en charge courtes et denses avec 2 à 3 séances par semaine sur 3 à 4 mois. D’autres, vont privilégier une durée de prise en soin plus longue si les entraînements sont réguliers, soit une séance par semaine pendant un an à 18 mois. Pour les troubles sévères, la prise en soins peut même durer plusieurs années », précise Domitille Weber.

De plus, des entraînements quotidiens impliquant la famille sont souhaitables. Des enfants qui avaient accumulé du retard peuvent ainsi le réduire progressivement. Des outils numériques peuvent aussi être utilisés en appui des séances, comme le recommandent les professionnels de santé.

 

Des dispositifs scolaires pour accompagner

Elle s’est adaptée, avec des outils et des aides à la disposition des enfants concernés. Cette pédagogie différenciée se décline en trois niveaux. Un programme personnalisé de réussite éducative (PPRE) pour les difficultés légères. Un plan d’accompagnement personnalisé (PAP) lors de troubles de l’apprentissage. Et un projet personnalisé de scolarisation (PPS) pour les cas les plus sévères, avec une reconnaissance de handicap et la présence d’un accompagnant d’élève en situation de handicap (AESH), si besoin. Selon les budgets des départements et l’importance des troubles, ces derniers peuvent être mutualisés.

Françoise Joseph, médecin coordinateur pour l’association Occitadys (bonus), met aussi en avant divers outils simples à la disposition des enseignants, « notamment le choix d’une police très lisible, comme Arial, avec des caractères assez gros (2 ou 14 avec des interlignes espacés et sans justification de texte). Ou l’utilisation d’un logiciel de traitement de texte comme Cartable Fantastique. Les livres numériques soulagent également les enfants dyslexiques. Ils leur permettent d’apprendre leurs leçons en écoutant, sans passer par la case lecture et donc le décryptage ».

 

 

Une scolarité impactée malgré tout

Beaucoup d’enfants dyslexiques devront vivre avec le trouble et une lenteur de lecture qu’il faudra compenser à vie. Cependant l’école est aujourd’hui plus inclusive et sait accompagner. « Pour les enfants en grande difficulté, il existe les classes ULIS (1) qui vont du CP à la 3e ainsi qu’au baccalauréat professionnel. Et, au-delà, de nombreux BTS et études universitaires sont compatibles avec une dyslexie », rassure le Dr Joseph.

Une incidence sur la vie adulte

Souvent catégorisés mauvais élèves, beaucoup de dyslexiques ont mal vécu leur scolarité. Aucun lien n’est établi entre la dyslexie et l’intelligence, néanmoins, cela se traduit souvent par un manque de confiance en soi. Il faut faire en sorte de restaurer une certaine sérénité. Fort heureusement, cette population développe d’autres facultés, orales ou manuelles. « Ainsi qu’une vraie capacité à s’adapter et trouver des solutions, souligne le Dr Joseph. Qui peut être un véritable atout dans la vie ! » ♦

 

Bonus
  • La classification internationale des maladies. La CIM fournit un langage commun qui permet aux professionnels de santé de partager des informations standardisées à travers le monde. La onzième révision contient environ 17 000 codes uniques, plus de 120 000 termes codifiables et est désormais entièrement numérique.

Le cadre de référence du diagnostic de « dyslexie/dysorthographie » est défini par des classifications internationales : la CIM 10 (Organisation Mondiale de la Santé, 2001) et le DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013).

 

  • Occitadys. Cette association a pour objet d’ encadrer et soutenir les pratiques de tous les professionnels concernés par les troubles spécifiques du neurodéveloppement et des apprentissages en Occitanie. Cette région est pilote dans le « Parcours de santé TSLA » (Troubles Spécifiques du Langage et des Apprentissages)  destiné aux enfants de 6 à 15 ans.